Incarcérée il y a deux semaines environ, suite aux tournures spectaculaires d’un banal litige foncier, Mme Bah Arabia Touré n’aura passé que quelques jours en détention. En vertu d’une mise liberté arrachée en appel contre l’avis des juges d’instance, la PDG a déjà repris du service, mais le dossier reste pendant au Tribunal de Grande Instance de la Commune II.
En desserrant les griffes acérées de la justice, Mme Bah Arabia Touré reste néanmoins dans l’expectative d’une issue définitive de l’affaire qui l’oppose aux prétendants à un droit coutumier sur le lotissement ACI de Souleymanebougou. En attendant le dénouement, on peut d’ores et déjà lever les équivoques quant aux allégations instillées sur son compte et relayées en abondance dans certains médias sociaux : ni malversation foncière, ni détournements de fonds ou de quelconques deniers. Il ne saurait en être autrement pour une dame si jalouse de sa réputation, qui affiche avec une fierté déconcertante ses prétentions et son attachement à l’intégrité. Le mandat de dépôt la concernant a plutôt trait à la disposition du bien d’autrui et opposition à l’autorité légitime, deux motifs d’incarcération qui découlent de l’impossibilité à donner suite à une décision de justice rendue aux dépens de l’Etat. Les faits remontent à 2016, avec comme élément déclencheur les réclamations d’un droit coutumier sur un domaine foncier de l’Etat, préalablement affecté à l’ACI aux fins de morcellement. Il s’agit d’un titre de 1947, âgé donc de 80 ans environ, dont la propriété sera disputée auprès de la justice par un groupe de familles. Sauf qu’une quinzaine d’années auparavant, en 2002 déjà, l’ACI détenait mandat de disposer de deux autres titres issus du même domaine et qu’elle prit soin d’aménager et de viabiliser avant leurs cessions à des acquéreurs pour le compte de l’Etat malien, conformément à ses missions et vocation.
L’Agence de cessions immobilières devait toutefois écoper d’une condamnation au bout d’une longue saga judiciaire, suite à la confirmation par la Cour suprême des prétentions coutumières qui seront plus tard annulées par la même justice au profit des acquéreurs privés.
L’actuelle PDG, qui n’était pas au départ du litige, a ainsi le malheur de se retrouver à l’arrivée avec le devoir et la responsabilité de l’affronter au mieux des intérêts de son entreprise. Il lui revenait vraisemblablement le choix cornélien de résister aux assauts judiciaires ou d’exposer l’ACI aux conséquences d’une annulation de la vente de terrains définitivement transférés du domaine privé de l’Etat à la propriété privée des nouveaux acquéreurs.
Il ressort de nos recoupements que l’Agence n’a d’ailleurs ni vocation ni habilitation à donner suite à une décision de justice d’une telle portée, qui implique un retrait pur et simple desdites parcelles. Et pour cause : la création des titres n’étant pas de son ressort, il n’appartient guère à l’ACI de procéder à une expropriation en la matière. Celle-ci passerait par une annulation des titres sur laquelle la décision de justice ne porte guère et qui relève au demeurant d’autres services appropriés de l’Etat.
Il va sans dire, par conséquent, que s’il y a disposition de biens d’autrui, elle découle de la création des titres par l’Etat et non de leur commercialisation que l’Agence tient des missions qui lui sont dévolues par ce même État. Qui plus est, la création des titres contestés ainsi que leur mise à disposition et même la cession des parcelles y afférentes sont toutes antérieures à la décision de justice qui consacre le droit coutumier sur le domaine, fait remarquer une source anonyme proche de l’Agence. En effet, la dernière affectation de parcelles sur le domaine litigieux remonte à 2016, bien avant l’avènement du directoire actuel de l’ACI et 5 ans avant sa condamnation à restituer les terrains. De quoi s’interroger si la décision de la Cour suprême n’a pas péché par une insuffisance qui contrarie les tentatives de son exécution forcée.
A KEÏTA