En juillet dernier, un mois après les élections européennes, Ursula von der Leyen était reconduite à la tête de l’exécutif européen malgré une avancée historique de l’extrême droite dans les rangs des eurodéputés. Dans son discours programmatique, elle expliquait clairement qu’elle ne toucherait pas au Pacte vert européen et réaffirmait un engagement climatique fort pour les cinq prochaines années. Une réponse cinglante à la droite et à l’extrême droite, dont les campagnes électorales, surfant sur la colère des agriculteurs, avaient fait des réglementations climatiques et environnementales la cause de tous les maux européens. Le Pacte vert était sauvé.
Ouf, on pouvait souffler. L’Europe deviendrait probablement le premier continent doté d’une économie décarbonée en 2050, et aurait déjà en 2030 baissé ses émissions de gaz à effet de serre de 55 % par rapport à 1990 grâce à un “ensemble de lois historiques”, comme le rappelle The Guardian. Elle serait un modèle de croissance verte prouvant qu’il est possible de concilier performances économiques, sociales et environnementales.
Qu’en est-il sept mois plus tard ? Le vent a tourné. Exit la croissance verte, vive le “sursaut compétitif”.
Le 26 février, la Commission européenne a proposé une loi omnibus qui allège les mesures sociales et environnementales du Pacte vert. Deux textes en particulier ont été expurgés. L’un exigeant des entreprises européennes qu’elles garantissent les droits humains et environnementaux tout au long de la chaîne de production, y compris pour les sous-traitants. L’autre obligeant à la rédaction d’un rapport de transparence sur la durabilité. Autrement dit, les entreprises européennes sont largement soulagées de leurs devoirs environnementaux.
Dans un éditorial du journal belge Le Soir, Michel De Muelenaere file la métaphore marine pour se désoler du spectacle : “Pareil à un trois-mâts qui, s’extrayant à peine de tempêtes, voit poindre le prochain typhon, le Green Deal européen fait peine à voir.” Et son “amiral”, Ursula von der Leyen, “qui, en 2019, promettait monts et merveilles lors du baptême de son esquif, est désormais muette”. De quoi a priori satisfaire les conservateurs, à l’instar de l’hebdomadaire polonais Wprost, qui en janvier, qualifiait le Pacte vert d’“extravagance écologique” aux “ambitions excessives de réduction des émissions de certains secteurs clés de l’économie”.
En fait, personne n’est pleinement ravi de cette évolution, constate Le Temps. “Le patronat et les milieux bancaires européens regrettent que le projet n’aille pas plus loin. Les ONG et milieux pro-environnement y voient un retour en arrière qui empêchera les flux financiers d’être dirigés vers la transition écologique.”
Au-delà de cette volte-face, ces changements laissent penser que la durabilité ne serait plus un atout pour la croissance économique, mais un fardeau dont il faudrait se débarrasser pour rester compétitif. Un bond en arrière qui fait mal au cœur, et qui va finalement dans le sens de l’AfD allemande ou du RN français.
Marine Cygler
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La Thaïlande adopte la taxe carbone
En Thaïlande, les fabricants de produits pétroliers tels que l’essence et le carburant d’aviation doivent désormais payer une taxe équivalent à un peu plus de 5,60 euros par tonne de CO2 émise. Ce prélèvement n’aura pas de répercussions immédiates sur les entreprises et les consommateurs, car il remplace une taxe existante sur les matières premières. Mais il devrait progressivement augmenter pour inciter les entreprises à réduire leurs émissions, explique Nikkei Asia. La Thaïlande rejoint ainsi Singapour, premier pays de la région à avoir introduit une taxe carbone en 2019. La Malaisie devrait suivre en 2026. Pour en savoir plus, c’est ici.
L’Amoc faiblit mais ne disparaît pas
Contrairement à certaines prédictions, il est peu probable que le système de courants de la circulation méridienne de retournement de l’Atlantique, connu sous son acronyme en anglais, Amoc, s’arrête complètement d’ici à la fin du siècle, conclut une étude publiée par Nature. Mais il reste urgent de réduire les émissions de gaz à effet de serre, car ce système, dont fait partie le Gulf Stream, ralentit depuis plusieurs années, du fait de la fonte des glaces polaires et de la modification des régimes de vents et de précipitations. Même un affaiblissement de 50 % de ce courant aurait des effets majeurs sur le climat. Pour en savoir plus, c’est ici.
Le roi du Maroc, la sécheresse et le mouton de l’Aïd
Le roi Mohammed VI demande aux Marocains de “s’abstenir d’accomplir le sacrifice de l’Aïd El-Kébir”, la fête religieuse qui aura lieu cette année le 5 ou 6 juin. Le souverain et commandeur des croyants invoque les “défis climatiques et économiques” qui causent une “régression substantielle de l’effectif du cheptel”, rapporte Media 24. La saison agricole en cours est fortement affectée par la sécheresse, qui sévit pour la septième année consécutive : le pays enregistre une baisse de 53 % des précipitations par rapport à la moyenne des trois décennies précédentes, explique TelQuel. Pour en savoir plus, c’est ici.
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