
Gérard Le Puill
Selon une note de plus de 100 pages publiée en mars par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) la croissance sera faible en France durant l’année 2025. Tandis que le pays européens prévoient d’investir massivement dans les armes de guerre en priorité, la précarité de l’emploi, déjà très élevée en France risque de croître à nouveau, ce que montre une étude de l’Institut des politiques publiques sur la préférence des patrons pour les réembauches en contrat à durée déterminée (CDD).
Cette longue note de conjoncture de l’INSEE qui traite de la France, de l’Europe et du monde, parue le 18 mars sous le titre « Désordre mondial, croissance en berne » n’a guère trouvé de place dans les journaux. En introduction, il est écrit qu’aux Etats-Unis, « l’imprévisibilité de la politique économique a fait vaciller la confiance: les consommateurs craignent un regain d’inflation et la croissance flageolerait au premier semestre (+ 0,4% au premier trimestre, puis + 0,3% au deuxième). L’instauration de droits de douane par la nouvelle administration américaine, ou même la simple menace de ceux-ci, mettrait un coup de frein au commerce mondial et frapperait les économies européennes dépendantes de la demande américaine, en particulier l’Allemagne et l’Italie. Le retournement géopolitique et le réveil annoncé des Européens en matière de défense ont, de surcroît, provoqué une hausse des taux souverains allemands, et partant de l’ensemble du continent. Ce raidissement obligataire vient contrarier l’assouplissement monétaire en cours de la Banque centrale européenne, dont la transmission à l’économie réelle était déjà incomplète ».
Concernant notre pays, l’INSEE indique que « l’économie française tournerait au ralenti au premier semestre (+0,1% au premier trimestre, puis +0,2% au deuxième) et l’acquis de croissance pour 2025 atteindra seulement + 0,4% à mi-année. Ce rythme est cohérent avec les réponses des entreprises aux enquêtes de conjoncture: le climat des affaires s’établi à 96 en février, en deçà de sa moyenne de longue période. La morosité est patente dans les industries intensives en énergie, comme la chimie et la métallurgie ». A supposer que la production des armes de guerre comme les chars, les avions de combat et les munitions augmente sensiblement, ce ne seront que des moyens de destruction dont ont voit les dégâts causés, ainsi que les milliers de morts et de blessés en Ukraine comme dans la bande de Gaza.
Un chômage à 7,6% et beaucoup de précarité
Tandis que le gouvernement fait état de la possibilité de créer 10.000 emplois pour produire des armes en France, l’INSEE indique qu’en 2025 « les entreprises continueraient de réduire leurs effectifs de 50.000 postes salariés au premier semestre, en partie compensés par des créations d’emplois non salariés. Conjuguée à une augmentation de la population active favorisée par la montée en charge de la réforme des retraites, cette baisse de l’emploi pousserait le taux de chômage à la hausse à 7,6% mi-2025 (…) Le taux d’épargne des ménages constitue un réservoir de croissance évident si la croissance se restaurait mais, à l’inverse, la dégradation du marché du travail pourrait les inciter à étoffer leur épargne de précaution ».
Passée aussi inaperçue que la longue note de l’INSEE, une étude de « l’Institut des politiques publiques » parue le 19 mars indiquait que 44,6% des embauches en France correspondent à la réembauche d’une personne qui a déjà travaillé en contrat à durée déterminée (CDD) dans l’entreprise qui vient de la recruter. Cette pratique sert aussi à freiner l’ancienneté dans l’entreprise et les augmentations de salaires qui vont avec.
Des emplois à durée déterminée à n’en plus finir
Franck Malherbet, l’un des trois auteurs de l’étude, faisait ce commentaire : « Nous avons été surpris par l’ampleur du phénomène qu’on pensait plus modéré. On s’attendait à des chiffres importants, mais, généralement, dans l’Union européenne, on est plus autour de 30% ». En France, selon les auteurs de l’étude, « entre 2012 et 2019, en moyenne, 97% des rappels effectués par l’employeur précédent concernent des CDD ». Partant de ce constat, les auteurs indiquent qu’il y a « un travail à faire sur le contrôle législatif ». Selon Franck Malherbet « il faut une application plus stricte du droit du travail pour limiter les abus ». Olivier Charlot, autre coauteur de l’étude, affirme que « les contrôles sont assez faibles et il y aussi beaucoup d’exceptions liées à des accords de branches ».
En France, selon des chiffres publiés en septembre 2024, 58,4% des personnes âgées de 55 ans à 64 ans qui n’étaient pas encore en retraite disposaient d’un emploi en 2023 contre 82,6% des personnes âgées de 25 à 49 ans. On imagine facilement que les entreprises qui renouvellent sans arrêt les CDD ne vont pas se tourner vers les travailleurs de plus de 55 ans en priorité. Quand on atteint ces âges, il ne suffit pas de « traverser la rue pour trouver un emploi » pour reprendre la formule cynique utilisée par le président Macron devant un jeune horticulteur en 2018 !
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