Le marché du porc entre espoir et incertitudes

Publié le 21 février 2025

Gérard le Puill

Sur le Salon de l’Agriculture, les porcins contenus dans de petits enclos sont moins regardés que les bovins. Les animaux de races pures ou croisées ont pour noms Large white, Landrace français, Piétrain, Duroc, à quoi s’ajoutent des races régionales, dont le Cul noir du Limousin, le porc blanc de l’ouest, le porc de Bayeux, le porc gascon, le porc de Corse dit porcu nustrale.

Viande fraîche et charcuteries comprises, chaque Français a mangé 31 kilos de porc en 2024. La consommation de viande porcine arrive juste derrière celle de la volaille, 31, 6 kilos, et devant la viande bovine qui atteint 21,3 kilos en équivalent carcasse. Dans le détail, 68,6% des produits porcins achetés en magasin sont des charcuteries. Leurs ventes reculent de -1,2% en 2024 et celles de la viande fraîche chute de -2%. Comme pour d’autres produits, les ménages sont de plus en plus regardants sur la dépense en viande porcine quand ils font leurs courses. Selon les professionnels de la filière porcine qui rencontraient la presse hier, les prix de la viande porcine avaient augmenté de 10% en 2023 dans les magasins par rapport à 2022, et la marge nette des enseignes serait de 8,2% sur les charcuteries et de 4% sur les viandes fraîches.

En page 8 du dossier de presse remis hier aux journalistes, un graphique montre que le prix de la tonne d’aliments composés servis aux porcs coûtait moins de 250 euros jusqu’à l’automne 2020 avant de croître régulièrement pour atteindre 390 euros de pendant plusieurs mois en 2022, quand le prix du kilo de carcasse était inférieur à 1,50 euros et ne couvrait pas les coûts de production. Cela a freiné l’installation des jeunes éleveurs dans un pays où 38% de chefs d’exploitations porcines ont plus de 55 ans actuellement, selon Christiane Lambert, éleveuse dans le Maine et Loire et ancienne présidente de la FNSEA. Sur son exploitation de quatre associés, dont elle-même, son mari, l’un de leurs fils et une ancienne salariée, la production de céréales et la récupération de drèches d’oléagineux sont suffisantes pour nourrir l’élevage porcin.


80% des porcs sont élevé s dans quatre régions


En 2024, quelques 21,9 millions de porcs ont été abattus en France pour 2,08 millions de tonnes de carcasses. 93% des personnes interrogées disent manger du porc régulièrement, ce qui semble concerner presque tout le monde, hormis les non consommateurs pour des raisons religieuses. Environ 75.000 tonnes de charcuteries ont été exportées en 2023. Mais la France importe aussi beaucoup de charcuteries produites dans des pays voisins à commencer par l’Espagne et l’Italie. La France exporte en Chine des morceaux à bas prix comme les pattes, les oreilles et les groins qui ne trouvent que peu de débouchés chez nous.


Plus de 80% des porcs élevés en France proviennent de quatre régions. La Bretagne arrive en tête avec 57% de la production. Elle est suive par les Pays de la Loire avec 11%, la Nouvelle Aquitaine 7% et la Normandie 5%. Alors que les régions Hauts de France, Grand Est, Bourgogne Franche-Comté produisent beaucoup de céréales et que ces dernières constituent l’essentiel de l’alimentation des porcs, l’élevage porcin y est très marginal. Il aurait pourtant le double avantage de consommer des produits locaux et de produire du fumier à partir de la paille et des déjections en porcherie. Cela permettrait d’enrichir les sols en matière organique et de réduire les achats d’engrais chimiques dont la production et l’épandage émettent du gaz à effet de serre.


Moins il y a d’élevages porcins, plus ils sont contestés

Mais selon les responsables de la filière, moins il y a d’élevages porcins dans une région, plus les opposants à l’introduction de cet élevage se mobilisent pour contester tout projet afin de ne pas sentir l’odeur du lisier dans leur zone de résidence. La capacité de la France à produire suffisamment de viande porcine pour répondre à la demande sur le marché intérieur s’érode. Notre taux d’autosuffisance est descendu à 98% en 2024 contre 99% en 2023. Avec une moyenne de 214 truies par élevage, on produit environ 5.000 porcs charcutiers par an sur une exploitation. Ces élevages de taille raisonnable facilitent la transmission des exploitations d’une génération à l’autre. Ajoutons que 87% des personnes interrogées lors des enquêtes d’opinion affirment qu’il est important à leurs yeux d’acheter de la charcuterie et de la viande de porc d’origine France afin de préserver notre souveraineté alimentaire.

Depuis la mise en place du marché commun agricole européen en 1962 entre la France, la République Fédérale Allemande, la Belgique, l’Italie, le Luxembourg et les Pays Bas, l’introduction de la concurrence entre les pays membres et les élargissements successifs de cette Europe qui compte désormais 27 pays ont produit beaucoup d’effets pervers. Comme si cela ne suffisait pas, l’Europe elle continue de signer des accords commerciaux avec des pays tiers. Dans les pays membres de l’Union européenne, la recherche de compétitivité par la spécialisation alimente les pollutions et fait reculer la fertilité des sols. C’est désormais un gros handicap face au changement climatique en cours.

Depuis deux ans les prix ont finit par remonter et le kilo de carcasse cotait 1,68€ le 10 février 2025 sur le marché au cadran de Plérin. Mais il est apparu au cours nos échanges avec les éleveurs rencontrés hier à Paris que les négociateurs des grandes enseignes de la distribution cherchent toujours à obtenir des prix d’entrée en magasin les plus bas possible malgré le vote de trois versions de la loi Egalim pour tenir compte de l’évolution des coûts de production que subissent les éleveurs.

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