Une filière du foie gras convalescente mais dynamique

Gérard Le Puill

Des éleveurs aux transformateurs, les professionnels de la filière des palmipèdes à foie gras se mobilisent collectivement pour faire remonter la production. Mais en ne prenant en charge que 40% du coût de la vaccination pour la campagne de 2025-2026, contre 70% lors de la précédente, le gouvernement handicape cette filière à la fois convalescente et dynamique pour retrouver son niveau d’activité d’avant l’arrivée de l’influenza aviaire en 2015.

Dans un document que vient de publier l’Interprofession du foie gras, un graphique montre que la filière avait produit plus de 20.000 tonnes de ce produit festif en 2015. La production avait chuté à 16.000 tonnes en 2016, pour descendre à 13.223 tonnes en 2017 avant de remonter à plus de 18.000 tonnes 2018. Puis elle est tombée à 9.045 tonnes en 2022, avant de remonter à 10.447 tonnes en 2023 et à 14.748 tonnes en 2024. La cause unique de ces fluctuations de la production fut l’influenza aviaire, une maladie contagieuse souvent véhiculée par les oiseaux migrateurs. Elle a souvent contaminé les palmipèdes à foie gras dont les canards représentent désormais près de 100% du cheptel, les oies étant en recul depuis des années.

Les canards à foie gras naissent dans des couvoirs et les poussins sont transportés chez des éleveurs qui en assurent l’élevage, puis le gavage dans presque tous les cas. Ces éleveurs sont surtout des exploitants familiaux en Nouvelle Aquitaine, en Occitanie, dans les Pays de la Loire et en Alsace, voire en Bretagne et Normandie pour quelques uns. Durant une grande partie des 11 à 14 semaines qui précèdent les 10 à 14 jours de gavage, ces canards accèdent dès que possible au plein air pendant une bonne partie de la journée, conformément au cahier des charges sur le bien-être animal dans la filière. Voilà pourquoi « la grippe aviaire » transmise par des oiseaux sauvages en cours de migration a contaminé les élevages. Pour contenir cette maladie très contagieuse, il fallut aussi abattre des palmipèdes sains quand leur site de production était proche d’un élevage contaminé.


La vaccination s’est révélée efficace depuis octobre 2023


Après plusieurs années difficiles pour les éleveurs, une campagne de vaccination a pu démarrer en octobre 2023.  Suite à ces 18 mois de vaccination, « force est de constater que la mobilisation de la filière des canards pour mettre en œuvre ce nouveau moyen de lutte contre l’influenza aviaire a été déterminante pour protéger l’ensemble des espèces avicoles. De plus, il est à noter que cette campagne de vaccination relève d’une décision particulièrement responsable au regard de l’évolution de la situation ailleurs en Europe et dans le monde. Aucun foyer n’a été détecté depuis le début de cette année 2025 et la France avait ainsi pu retrouver son statut indemne le 4 février. Aucun abattage préventif n’est à déplorer depuis l’été dernier et seulement 15 foyers ont été détectés et rapidement maîtrisés. Sur la saison dernière, plus de 400 foyers avaient été constatés», affirme l’Interprofession.


Faut-il en déduire que tout va pour le mieux dans la filière des palmipèdes à foie gras désormais ? Non car le recul de la production s’est aussi traduit par un recul sensible du revenu de nombreux éleveurs dont les canards furent victimes de l’influenza aviaire. Selon l’Interprofession, le coût total d’une campagne de vaccination dans les deux filières des canards gras et des canards élevés pour leur chair sans gavage s’élève à plus de 100 millions d’euros par an. « Pour la première année de campagne de vaccination, d’octobre 2023 à septembre 2024, 85% du montant fut financé par l’Etat et les 15% restants pris en charge par les professionnels de la filière. Pour la deuxième campagne de vaccination démarrée au début d’octobre 2024, l’État avait décidé de limiter son financement à 70% du coût, doublant ainsi le reste à charge pour la filière foie gras. Pour la troisième campagne de vaccination sur 2025-2026, l’État a déjà annoncé une forte baisse de son accompagnement à seulement 40% pour cette prochaine campagne ».


Quand l’évolution du virus contamine des bovins

Tandis que l’Europe et la France annoncent des chiffres sur une progression spectaculaire des dépenses en armes de guerre pour les toutes les prochaines années, notre production agricole- tout comme l’âge et de le nombre d’année de travail permettant de partir en retraite avec un niveau de pension décent- se trouve remis en cause par le président Macron et le gouvernement dirigé par François Bayrou. Alors que le changement climatique en cours contribue à faire reculer la souveraineté alimentaire de la France sur fond de dumping social et environnemental, l’Interprofession du foie gras indique que le financement par l’État est vital pour poursuivre la vaccination, qui évite l’abattage préventif de milliers d’animaux et dont le coût est considérablement inférieur par rapport aux indemnisations. De plus, cette vaccination des canards protège aussi l’ensemble des volailles et évite la circulation de virus potentiellement transmissibles à d’autres espèces. C’est également une question de santé publique .

On apprenait récemment que l’évolution du virus de « la grippe aviaire » avait récemment contaminé des bovins aux Etats-Unis. Espérons que ce ne sera pas le cas en Europe.

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