Le danger digital
Depuis quelques années, c’est l’un des sujets majeurs de la Semaine nationale de la petite enfance, qui vient de se terminer : le rapport aux écrans de nos chers bambins… et, soyons réalistes, de l’ensemble de la société. Dans Écrans, un désastre sanitaire. Il est encore temps d’agir (Gallimard, 2025), la neurologue Servane Mouton passe au crible nos nouveaux comportements depuis le déploiement massif des smartphones, en 2007.
Quelques chiffres : 32 milliards d’objets connectés dans le monde ; environ une heure de connexion chez les moins de 3 ans (cohorte Elfe, étude Inca3) et près de cinq pour les adolescents, et il faut savoir que le temps « scolaire » d’écran n’est nullement inclus dans ces données.
Servane Mouton en dresse les conséquences néfastes. Ce sont d’abord des troubles visuels. Ce sont encore des effets délétères de la sédentarité tels des risques renforcés des maladies cardiovasculaires, de surpoids, des altérations du sommeil avec des troubles alimentaires et de l’humeur et de la concentration. Le développement neurologique et socio-émotionnel se trouve fortement compromis, surtout chez les plus jeunes, qui connaissent une grande malléabilité du cerveau (jusqu’à 25 ans), avec une perte de l’attention endogène au seul profit de l’attention exogène et une sursollicitation des circuits de la récompense.
On assiste aussi à une fragilisation de la santé mentale, à cause notamment des expériences maltraitantes en lien avec le phénomène des réseaux sociaux et de la pornographie. Les parents en prennent aussi pour leur grade, car le parent absorbé par le monde digital (phubbing) tend à ignorer les sollicitations de l’enfant. Face à ce problème majeur de santé publique, un monde économique d’une extrême puissance : plus de 3 000 milliards de dollars de capitalisation boursière pour Apple début 2022, 2 500 pour Microsoft, 1 900 pour Google, 1 700 pour Amazon, etc. Le cofondateur de Netflix Reed Hastings déclarait récemment : « Mon principal concurrent, c’est le sommeil. »
Derrière la novlangue « verte » des technologiques de l’information et de la communication (TIC) – comme les termes « cloud » ou encore « dématérialisation » – , une géopolitique des « minerais de sang », qui a poussé la République démocratique du Congo, en décembre dernier, à déposer des plaintes pénales contre Apple en France et en Belgique pour recel, crimes de guerre, biens volés, blanchiment de minerais issus de conflits et pratiques commerciales trompeuses.
Un engouement qui ne questionne que trop rarement l’impact réel des TIC sur la santé des individus, mais aussi l’efficacité des dispositifs d’apprentissage qu’elles privilégient. Servane Mouton en appelle à des actions collectives en justice à l’encontre des plateformes du numérique, comme au Canada (des parents ont porté plainte contre le distributeur de jeux vidéo Epic Game) ou aux États-Unis (42 États contre Meta).
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