Le Maroc franchit un cap stratégique dans le secteur de l’aéronautique. En marge du Salon Marrakech Air Show, qui se tient du 30 octobre au 2 novembre dans la ville ocre, a eu lieu la signature de plusieurs accords majeurs. Parallèlement, les témoignages des grands patrons mondiaux présents sur le saut qualitatif réalisé par le Maroc dans ce secteur reflètent la confiance accordée par les investisseurs au Maroc et la réussite des partenariats conclus avec le pays. Les détails.
Plusieurs grands noms de l’industrie aéronautique et la défense sont présents au Salon Marrakech Air Show qui se tient du 30 octobre au 2 novembre dans la ville ocre. Airbus, Safran, Tata Advanced Systems, Lockheed Martin, Embraer, ou encore CATIC y prennent part. Il faut dire que le Maroc a durant ces dernières années développé un écosystème aéronautique qui ne cesse de s’élargir. Comme l’a rappelé le chef de gouvernement lors de la séance inaugurale qui s’est déroulée le 30 octobre le Maroc a entamé dès le début des années 2000, la fabrication des câblages électriques destinés à l’aéronautique et a commencé dès lors à se positionner en tant qu’opérateur international éminent dans le tissu de l’industrie aéronautique et comme destination privilégiée pour le secteur de la manutention dans ce domaine. « Dans le cadre de cette dynamique, le Maroc a œuvré pour la mise en place de six systèmes intégrés d’aéronautique à haut potentiel, comprenant l’assemblage, l’ingénierie, l’entretien, le câblage électrique et le moteur et ses composants. A cela s’ajoutent deux systèmes intégrés d’approvisionnement, comprenant les deux leaders mondiaux de l’aéronautique que sont Boeing et Collins », relève le chef de l’Exécutif notant que le Maroc est devenu un hub régional leader dans l’industrie aéronautique en Afrique. Cet élan se traduit par l’attractivité du pays. En effet, ce secteur stratégique dans notre pays a pu attirer plus de 150 entreprises comme Boeing, Airbus, Safran et d’autres grandes firmes internationales. « Le dernier exemple en date de ces partenariats fructueux est celui de la société Safran qui a signé cette semaine, à l’occasion de la visite d’État dans le Royaume du Président français SEM Emmanuel Macron, un nouveau partenariat avec le Maroc pour le développement d’un réseau d’entretien et de réparation des moteurs », a fait remarquer Aziz Akhannouch. En termes d’exportations, la dynamique de l’aéronautique au Maroc a permis au secteur de contribuer à augmenter le volume des exportations nationales. Ainsi, le volume des exportations du secteur s’élève à 23 MMDH l’année dernière multipliant par trois la valeur d’exportations entre 2013 et 2023. «Le secteur a également réalisé au cours de cette année la plus grande croissance de ses exportations, établie à 21 % à fin août 2024 », selon le chef de gouvernement. Pour ce qui est de l’emploi, les effectifs des compétences nationales employées par le secteur se sont démultipliés pour atteindre 24.000 postes d’emploi à fin 2023. Un autre chiffre révélateur de la dynamique que prend le secteur est celui du taux d’intégration locale qui s’établit aujourd’hui à plus de 42 %, au moment où ce taux ne dépassait guère 17 % en 2014.
Développement des secteurs de pointe
L’ambition portée par le Maroc est d’agrandir son écosystème industriel. « On procède aujourd’hui au développement de secteurs nouveaux de pointe, en se basant sur des métiers à plus forte spécialisation, notamment en ce qui concerne les cockpits d’avions, le développement du démontage des avions, l’entretien et la réparation et la transformation des avions de ligne en avions cargos, et ce à travers des partenariats entre des groupes internationaux majeurs et les opérateurs locaux », souligne-t-il . Et d’ajouter : « Dans le sillage de ces mutations positives que connaît le secteur et afin d’accompagner les grandes évolutions que connaît l’industrie aéronautique dans le monde, le Royaume planifie de manière minutieuse pour intégrer la sphère des industries de pointe, en se focalisant particulièrement sur les technologies industrielles numériques avancées 4.0, sur l’innovation et sur la recherche et développement ». Dans ce schéma, le capital humain joue un rôle important. «Nous pouvons être fiers du capital humain hautement qualifié dont dispose notre pays et où les femmes représentent plus de 42 %. Nous nous attelons à renforcer ce capital à travers l’ouverture d’une série de Cités des métiers et des compétences dans toutes les régions du Royaume», argumente le chef de gouvernement.
Des partenariats majeurs
Lors du Salon aéronautique de Marrakech, Safran Aircraft Engines a signé plusieurs accords avec le Maroc dans le cadre de la création de son nouvel atelier de maintenance et réparation (MRO) dédié au moteur LEAP. Ce dernier, annoncé le 28 octobre lors de la visite d’Emmanuel Macron à Rabat sera situé à proximité de l’aéroport de Casablanca et sera opérationnel dès 2026. Le premier protocole d’accord (Memorandum of Understanding) est signé avec le GIMAS pour la formation de mécaniciens et techniciens moteurs. Afin de répondre aux besoins de l’atelier de maintenance existant (Safran Aircraft Engine Services Morocco) avec Royal Air Maroc et de ce nouvel atelier dédié au LEAP, cet accord prévoit, dès le premier trimestre 2025, le développement et la mise en place de parcours de formation pouvant accueillir entre 60 et 100 stagiaires par an. Et ce n’est pas tout. Deux autres accords concernant le projet d’implantation du nouvel atelier au sein de la zone franche Midparc, située dans la zone aéroportuaire de Casablanca, ont été conclus. Le premier inclut l’offre de vente d’un terrain d’environ 6 hectares avec MedZ, société détenue par la Caisse de dépôts et de gestion (CDG), et le deuxième concerne le contrat de prestation avec Midparc relatif à la mise en œuvre du projet immobilier associé. «Ces accords vont nous permettre un démarrage rapide de la construction de notre nouvel atelier au premier semestre 2025 et des opérations un an plus tard», affirme Jean-Paul Alary, président de Safran Aircraft Engines, en marge de ces signatures au Salon de Marrakech. Et d’ajouter : «Je suis ravi de renforcer nos partenariats avec ces acteurs de premier plan qui nous permettront de bénéficier des meilleurs standards en termes de formation et d’infrastructures et de performance bas carbone». Pour Safran, ce nouveau site de maintenance emploiera à terme plus de 600 personnes. Il disposera d’une capacité de maintenance de 150 moteurs par an et permettra ainsi de répondre au succès du moteur LEAP, en particulier pour les compagnies aériennes situées en Afrique, au Moyen-Orient et en Europe. « Il renforcera l’empreinte industrielle de Safran au Maroc, où le Groupe est implanté depuis 25 ans employant près de 4.700 personnes au sein de 8 sociétés ou co-entreprises », indique le Groupe. A noter qu’en avril dernier, Safran Aircraft Engines et son partenaire Royal Air Maroc ont signé un Memorandum of Understanding (MoU) actant la poursuite de la croissance du site en passant de 70 à 100 moteurs CFM56 par an d’ici 2026. Cette journée a également été marquée par la signature par le ministre de l’industrie et du commerce, Ryad Mezzour, le ministre délégué auprès du chef de gouvernement chargé de l’Administration de la défense nationale, Abdellatif Loudiyi, et le président de l’Université Polytechnique Mohammed VI, Hicham El Habti, d’un accord de partenariat pour la création d’un centre de recherche en fabrication avancée en partenariat avec Boeing, intitulé «Centre africain de fabrication d’excellence (ACME) ». Selon le ministère du commerce et de l’industrie, la sélection de l’entreprise 100% marocaine NTS Technics a été annoncée en tant que partenaire d’ingénierie. Celle-ci sera soutenue par Boeing afin d’atteindre le niveau 3 de conception et d’être considérée comme un fournisseur agréé en ingénierie pour Boeing. L’entreprise a été sélectionnée à la suite d’un processus de sélection conjointement mené par le ministère de l’industrie et du commerce, l’Administration de la défense nationale et la société Boeing. A ce propos, le ministre de l’industrie et du commerce a indiqué : « Investir dans l’avenir du Maroc et établir une empreinte aéronautique solide pour les générations futures sont au cœur de cette alliance ». Et de souligner : «Nous sommes ravis d’étendre notre partenariat avec Boeing pour faire de l’industrie marocaine un leader mondialement reconnu au premier rang de l’innovation et de l’excellence dans l’aéronautique. ».
Durant ce Salon, le gouvernement marocain a signé un mémorandum d’entente avec Embraer. Il s’agit de lancer des projets conjoints dans l’industrie aéronautique marocaine, couvrant les domaines de l’aviation commerciale, de la défense et de la mobilité aérienne urbaine. Comme le relève le ministère du commerce et de l’industrie, ce mémorandum d’entente souligne également la volonté mutuelle de renforcer et d’élargir la coopération et les investissements entre la République Fédérale du Brésil et le Royaume du Maroc, en vue de renforcer la coopération atlantique entre deux références du Sud global. Cet accord a été signé par le ministre de l’industrie et du commerce, Ryad Mezzour, le ministre délégué auprès du chef de gouvernement, chargé de l’investissement, de la convergence et de l’évaluation des politiques publiques, Karim Zidane, le directeur général de l’Agence marocaine de développement des investissements et des exportations, Ali Seddiki, et le président et PDG d’Embraer Commercial Aviation, Arjan Meijer. « L’accord couvre des opportunités dans les domaines de l’aviation commerciale, de la défense et de la mobilité aérienne urbaine, en offrant un cadre pour construire un écosystème sourcing intégré au Maroc, favorisant l’innovation et la croissance économique et contribuant à la création d’emplois ainsi qu’au développement des compétences locales », souligne le même département notant que ce projet de coopération prendra également en compte un large éventail de domaines à développer par étapes progressives, notamment la formation et la MRO (Maintenance, Réparation et Révision). En plus, d’autres domaines seront explorés pour des collaborations potentielles, notamment le domaine de Recherche et Technologie, en particulier dans la décarbonisation, la mobilité propre, l’aviation durable et les carburants d’aviation durable. « L’impact économique potentiel estimé de tous les projets, une fois terminés, y compris la maintenance, réparation et révision, la formation, le développement de l’écosystème et d’autres domaines, atteindra 300 millions de dollars US avec la création de 300 emplois d’ici 2030, et jusqu’à 1 milliard de dollars US et la création de 1.000 emplois d’ici 2035», précise la même source. Pour Arjan Meijer, président et PDG d’Embraer Commercial Aviation, «il s’agit d’une opportunité unique pour Embraer de développer une relation à long terme avec l’industrie aéronautique marocaine, forte et dynamique ». Et d’ajouter : «Il est particulièrement agréable de constater que nos nouveaux partenaires à Rabat accordent la même importance aux compétences et à la formation que nous chez Embraer. L’éducation, les compétences et le développement des jeunes sont la base de toute industrie solide, et une valeur commune pour toutes les parties. Nous avons hâte de changer les choses ensemble, de faire croître l’industrie et de maximiser les bénéfices pour tous». De son côté Bosco da Costa Junior, président et PDG d’Embraer Défense et Sécurité, a précisé : «Le Maroc est destiné à être un partenaire majeur pour Embraer Défense et Sécurité, et nous nous engageons à collaborer étroitement avec les Forces Royales Air marocaines pour positionner le C-390 comme le choix de référence pour leurs futures capacités de transport aérien tactique. Notre soutien inclurait une formation complète, la maintenance et la logistique pour leur flotte».
L’ambition de fabriquer un avion complet dans l’avenir
Défis. Le Maroc a de grandes ambitions dans le secteur de l’aéronautique, il compte doubler le nombre d’emplois dans le secteur à l’horizon de 2030. Selon le ministre de l’industrie et du commerce, Ryad Mezzour, le Royaume est fort de sa stabilité politique, ses infrastructures, sa position stratégique, sa main-d’œuvre jeune et qualifiée, et de son climat d’affaires favorable et se positionne comme un partenaire fiable et une plateforme régionale pour le développement du secteur aéronautique. Il a également expliqué que le Royaume a fait preuve, lors des dernières années, de ses capacités à tous les niveaux de la production attirant des partenaires internationaux de premier plan. Pour M. Mezzour, cette dynamique permet au Maroc de produire n’importe quelle pièce d’avion relevant que l’ambition du Royaume est d’aller de l’avant dans cette démarche pour la fabrication d’un avion complet dans l’avenir.