Castée pour le film «Les évadés de Tindouf», docteur Alia Bencheikh a été l’une des belles surprises de ce tournage et du long-métrage, qui sort dans les salles de cinéma le 6 novembre 2024. Un jeu instinctif, à la fois juste et profond, sans aucune fioriture, encore moins des plis propres à de nombreux « acteurs » et « actrices » aujourd’hui, dans le paysage de l’imagerie au Maroc.
Elle joue Fatima dans le film « Les évadés de Tindouf », produit par Orion Productions. Son personnage est celui d’une jeune femme gradée de l’armée marocaine qui a été kidnappée et tenue prisonnière dans les camps de Tindouf durant 25 ans. Quand elle a fait le casting pour ce rôle, Alia Bencheikh avait derrière elle une formation d’actrice en amatrice et des ateliers d’acting, et rien de plus. Mais, elle a toujours aimé le théâtre, elle en a fait longuement étant jeune étudiante et elle aime le cinéma avec passion. Mais de là à jouer dans un film, d’incarner un personnage aussi lourd et aussi complexe, il faut du coffre, de la puissance, beaucoup d’intuition, de l’intelligence émotionnelle et une grande dose de travail et d’application : «Je ne pensais pas aller aussi loin dans ce rôle. Certes, le personnage de Fatima est complexe, humain, avec une énorme charge de douleur et de résilience, mais être au plus près des sentiments et des émotions que cela implique et vivre ce rôle pendant des jours comme une deuxième nature, c’est là toute la beauté et la grâce du cinéma et de la créativité. J’ai lu le scénario, j’ai assimilé le personnage, j’ai saisi ce que le réalisateur veut voir à l’écran, j’ai intériorisé tous ces éléments et j’ai vécu avec mon personnage.
Dans une large mesure, je suis devenue Fatima, avec son passé, avec sa vie d’avant, ses longues années en prison, sa force, sa résistance et ses espoirs. Il faut aussi dire qu’avec le réalisateur du film, nous avons tous eu une liberté totale d’incarner nos personnages et de leur donner les mots qui vont avec, de façon naturelle. Il ne s’agissait pas de restituer ce qui était écrit sur la feuille de service, mais de dire les choses telles que senties de l’intérieur, avec nos propres mots, nos propres réflexes face à toutes les situations que nous devions jouer », précise Alia Bencheikh. Et c’est cette faculté d’adaptation chez Alia Bencheikh, avec certes son apprentissage et son expérience en tant que médecin, qui sait ce qu’est la discipline, qui sait ce qu’est l’implication et la rigueur, qui a fait que ce rôle de Fatima a été l’un des plus ficelés de ce film.
Alia Bencheikh qui chante très bien aussi a même été jusqu’à improviser une chanson lors de l’une des scènes les plus bouleversantes de ce film, le moment où l’un des détenus meurt dans le désert, sur le sable et ses compagnons d’évasion vont l’enterrer dignement et lui rendre hommage pour toute sa bravoure et son abnégation. Fatima, alias Alia Bencheikh, couvre le corps de son ami de sable et lance d’une voix douloureuse, comme une marche funèbre des sonnets tirés d’une belle chanson marocaine, intitulée : «Rahila», immortalisée par Mohamed El Hayani, mais avant cela par feu Abdessalam Amer. Nous avons tous été saisis par cette improvisation et le chef opérateur Abderrahmane Alami a continué de filmer, comme si on avait répété cette scène avant de la mettre en boîte, jusqu’au bout, nous offrant l’un des instants les plus magiques de ce tournage et de ce film.
«C’est venu comme ça, je ne connaissais même pas les paroles, j’ai pris mon téléphone juste avant de tourner les scènes et j’ai lu un peu, puis, une fois sur place, les mélodies sont revenues et m’ont envahie, et j’ai chanté, comme une litanie, comme un cantique, comme une oraison funèbre pour accompagner un frère d’armes à sa dernière demeure, dans le sable, la nuit, seuls, perdus dans l’immensité d’un désert hostile, sans aucune autre forme d’espoir que notre détermination d’aller au bout de notre périple de retour vers chez nous, vers notre terre, notre pays, après 25 ans de détention barbare», ajoute Alia Bencheikh, qui fait déjà partie du prochain casting du film «Cannabis», toujours produit par Orion Productions.