La lutte contre les mauvaises herbes dans les vergers est une tâche importante pour les arboriculteurs, car ces adventices entrent en concurrence directe avec les arbres pour les ressources vitales telles que l’eau, la lumière et les nutriments. Une gestion efficace des mauvaises herbes nécessite l’adoption de stratégies intégrées, combinant des méthodes chimiques, mécaniques et culturales pour minimiser leur impact tout en maintenant un environnement favorable à la croissance des arbres.
Pourquoi est-ce un problème ?
En plus de ralentir la croissance des arbres, surtout lorsqu’ils sont jeunes, les adventices peuvent également héberger des agents pathogènes et des ravageurs, augmentant ainsi les risques de maladies et de nuisances. Elles compliquent également les déplacements des ouvriers et les opérations agricoles, et peuvent accroître le risque de gel en modifiant le microclimat autour des arbres.
Pourquoi s’intéresser aux mauvaises herbes?
On trouve des mauvaises herbes dans tous les vergers, mais il y a de grandes variations entre les espèces poussant dans chacun et les densités de population qu’ils hébergent. De la même façon que le dépistage des insectes et des maladies s’inscrit dans toute démarche de lutte intégrée contre les infestations d’organismes nuisibles, le dépistage des mauvaises herbes est l’élément premier de tout programme de désherbage efficace. Ainsi, l’information recueillie lors des tournées de dépistage permettra au producteur :
d’identifier les mauvaises herbes en début de saison, au moment où leur présence peut nuire aux rendements;
de déterminer les herbicides à utiliser en fonction des mauvaises herbes à détruire;
de choisir le cultivateur le mieux adapté à l’arrachage des mauvaises herbes à éliminer;
de modifier ses méthodes de culture en fonction du cycle de vie des mauvaises herbes;
de découvrir et de détruire les foyers localisés de mauvaises herbes avant que celles-ci ne se répandent dans le verger;
de déterminer les zones où le travail du sol est à éviter;
de déterminer les zones où il faudra procéder à un traitement localisé;
de choisir le meilleur moment d’intervenir contre les mauvaises herbes.
Comment faire le dépistage ?
Le dépistage des mauvaises herbes peut se faire en même temps que celui des insectes et des maladies, mais une tournée distincte permettra des observations plus précises et une collecte plus sélective. Les étapes et les règles à suivre sont les suivantes :
identifier le type de mauvaise herbe (graminée ou dicotylédone);
déterminer le cycle de vie de la plante (annuelle, bisannuelle, vivace);
trouver le nom de la mauvaise herbe, si possible;
repérer la source des mauvaises herbes. Par exemple, dans le paillis posé au pied des arbres, dans une rangée voisine de piquets de clôture, dans une échappée de mauvaises herbes, dans l’eau d’irrigation, etc.;
cueillir des échantillons (avec racines, fleurs et tiges) pour procéder à une vérification (ranger ces échantillons dans un sac de papier, à l’intérieur d’un sac de plastique étiqueté);
examiner soigneusement les bords du verger à la recherche d’empiétements par les mauvaises herbes.
Comment consigner les résultats du dépistage ?
L’établissement de fiches d’observation à jour facilitera la prise de décision pour la saison en cours et permettra de constituer un dossier à long terme sur les invasions de mauvaises herbes et les problèmes connexes du verger. On devrait notamment retrouver sur ces fiches :
le nom des mauvaises herbes (si possible),
les stades de croissance des mauvaises herbes et de la culture,
le nombre et la forme des feuilles,
le moment où se produit la floraison,
l’emplacement des zones infestées, reportées sur une carte du verger, et la proportion de la superficie totale infestée.
Objectifs de la lutte
Lors des périodes critiques de la croissance des arbres, il est important de combattre efficacement les mauvaises herbes, pour les empêcher de nuire aux cultures. Les aspects importants à retenir sont les suivants :
une protection efficace permettra d’éviter une baisse des rendements;
lorsque les mauvaises herbes gênent le développement des arbres pendant la période sensible, notamment dans l’année de plantation des arbres, les effets néfastes pourront se prolonger sur plusieurs années, voire la vie entière des arbres.
les mauvaises herbes qui poussent après la ou les périodes sensibles ne nuiront pas considérablement aux cultures;
améliorer l’efficacité de la cueillette,
réduire l’accumulation de graines de mauvaises herbes dans le sol.
La concurrence livrée par les mauvaises herbes aux arbres fruitiers dans l’année de leur plantation ralentit considérablement leur croissance. Bien sûr, le maintien d’une bande libre de mauvaises herbes sous les arbres exige beaucoup d’énergie, mais il faut savoir que la présence même clairsemée de ces herbes nuit considérablement à l’arbre.
Période de sensibilité des arbres en production
Pour un arbre qui porte des fruits, les effets néfastes de la concurrence exercée par les mauvaises herbes atteignent leur maximum entre le débourrement et le stade de formation du bouton terminal. Selon les espèces, cette période correspond à quatre stades repères : la floraison, la nouaison, le grossissement des fruits et le début de la formation des boutons floraux.
Les conditions climatiques pendant la floraison, la nouaison et le grossissement des fruits influencent la récolte de la saison de croissance en cours, tandis que les conditions régnant au début de la formation des boutons floraux influenceront la récolte de la prochaine saison de croissance. La concurrence des mauvaises herbes doit être supprimée durant cette période de grande sensibilité.
Gestion intégrée dans les vergers
Les adventices infestant les vergers sont multiples et diversifiées. La lutte doit être abordée de manière globale et adaptée aux conditions locales, en combinant des pratiques chimiques, mécaniques et biologiques.
Importance de l’identification des adventices
Il est essentiel de bien identifier les espèces d’adventices présentes dans le verger. Certaines herbes annuelles peuvent proliférer rapidement, tandis que des espèces vivaces comme le chiendent ou le liseron sont plus difficiles à éradiquer en raison de leur résistance aux traitements standards. L’identification permet de choisir des techniques adaptées et d’optimiser l’efficacité des interventions. En effet, une identification précise permet non seulement de choisir des techniques adaptées mais aussi de réduire les coûts d’intervention, en ciblant précisément les mauvaises herbes et en appliquant les méthodes les plus efficaces selon le type de verger et la nature des adventices présentes (vivaces, graminées, dicotylédones, parasites).
Désherbage chimique raisonné
Les herbicides jouent un rôle central dans le contrôle des mauvaises herbes. Toutefois, leur utilisation doit être rationnelle pour éviter le développement de résistances et limiter l’impact environnemental. Afin de maximiser l’efficacité des herbicides utilisés, il est conseillé de traiter au bon moment, en fonction des stades de croissance des adventices et des conditions climatiques.
Les herbicides de pré-levée détruisent, d’une part, les plantes traitées et, d’autre part, bloquent la germination et la levée des adventices graminées et dicotylédones. Ils peuvent être appliqués sur l’ensemble du verger ou uniquement sous les arbres. Une application de pré-levée est plus efficace si le sol est humide au moment du traitement. Si le sol est sec, il faut reporter l’intervention en post-levée précoce, sous réserve que le sol soit humide au moment du traitement. Il est recommandé de respecter les doses et surtout les délais avant récolte.
Quant aux herbicides de post-levée, il faut distinguer entre les produits de contact et les produits systémiques. Les herbicides de contact agissent à l’endroit de l’impact et détruisent la partie aérienne des plantes traitées. Les herbicides systémiques foliaires pénètrent dans la plante par les feuilles et migrent vers le système racinaire. A forte dose, un produit à base de glyphosate par exemple a l’avantage de détruire le système racinaire des adventices vivaces comme le chiendent, le souchet, la morelle, etc.
Les herbicides peuvent être utilisés dans les jeunes plantations à condition de prendre des précautions pour ne pas toucher le feuillage ou les troncs non encore lignifiés. On peut utiliser soit un cache d’herbicides placé au-dessus des buses, soit des sacs en plastique autour des jeunes plants, avant l’application des désherbants.
Techniques manuelles, mécaniques et culturales
Le désherbage mécanique, tel que le binage ou l’utilisation de herses, permet de contrôler les mauvaises herbes sans recourir aux produits chimiques. Cette méthode est particulièrement adaptée aux jeunes vergers où l’usage d’herbicides pourrait endommager les racines superficielles.
Entre les rangs, les labours superficiels avec le covercrop, le gyrobroyeur ou le cultivateur sont efficaces sur les adventices annuelles par sectionnement des tiges et des racines, mais inefficaces sur les vivaces. Le matériel ne doit pas excéder une certaine profondeur pour ne pas blesser le système racinaire des arbres, car les arbres ont des racines profondes, mais aussi des racines superficielles en surface.
Le sarclage manuel, essentiellement sous les arbres, nécessite une main d’œuvre qualifiée, sachant que le nombre de personnes et le coût par hectare dépendent du niveau d’infestation par les adventices. C’est une activité très pénible et exigeante en main d’œuvre, malheureusement devenue chère et indisponible. Lorsque le sarclage manuel est réalisé tard, les adventices ont déjà exercé une forte concurrence sur les arbres. Si le sol est humide au moment du sarclage, certaines plantes coupées ne se dessèchent pas et parviennent à repousser.
En outre, des techniques de paillage organique ou plastique peuvent limiter la germination des adventices en bloquant la lumière nécessaire à leur croissance. Le paillage présente également l’avantage de maintenir l’humidité du sol, favorisant ainsi la croissance des arbres.
A noter que dans les jeunes vergers, il est possible de désherber (mécaniquement, manuellement ou chimiquement) une bande de 50 cm de part et d’autre du rang, alors que dans les vergers adultes, il est conseillé de ne pas désherber au-delà de la largeur de la frondaison.
Que faire avant d’installer un verger ?
Il faut examiner le terrain et connaître les espèces adventices présentes et leur abondance. Car, il est relativement plus facile de contrôler les adventices, essentiellement les vivaces, avant de planter les arbres. Un ou deux traitements moyennant un herbicide adapté seraient nécessaires pour détruire les vivaces difficiles comme la morelle, le chiendent, le souchet, le sorgho d’Alep, etc.
Attention à la résistance
L’utilisation répétée du même herbicide, ou des herbicides ayant le même mode d’action, peut conduire à l’apparition de la résistance des adventices aux herbicides. Par conséquent, la rotation des produits ayant divers modes d’action est devenue nécessaire dans la gestion intégrée des adventices.
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