Ce matin, dans décryptage, apaisement.
27 novembre 2024, selon le communiqué du conseil des ministres, Assimi Goïta, président de la Transition, “accorde une attention particulière à l’apaisement du climat social”. Il règne désormais au Mali une atmosphère de gouvernance apaisée. Dusu saalo en bambara, musulha en songhay, l’apaisement consiste à réguler les tensions pour un mieux vivre ensemble. Il s’agit de travailler à une gestion intègre des affaires publiques. Une course de fonds à laquelle Goïta inscrit le nouveau gouvernement pour deux raisons.
Capter le désir d’unité
La première raison est sociale. Président de la transition malienne depuis presque quatre ans, Goïta, fin stratège militaire, a compris que quand les Maliens dégustent leur thé, ils rêvent de tranquillité. S’il désire réunir les Maliens des campagnes et des villes, Goïta doit jouer dans le même camp qu’eux, celui de la paix.
Il a aussi compris qu’il serait difficile d’apaiser la société malienne lorsque le cœur bat la chamade en raison de la segmentation de la société. Certains sont traités de supers patriotes, d’autres d’apatrides. Une dichotomie qui s’exprime dans les privations : arrestation, sanction. Par exemple, le retrait de la licence de Joliba TV News par la Haute autorité de la communication épouvante tout défenseur de l’Etat de droit, pilier de notre système démocratique déjà bien malmené par les crises successives : institutionnelle, sécuritaire…
Or, sans média libre, pas d’information indépendante et claire. Méfions-nous, les injustices nourrissent les révoltes. Aujourd’hui, dans le souhait de Goïta d’apaiser le climat social, le gouvernement du Premier ministre Abdoulaye Maïga a tout intérêt à mieux capter le désir d’unité des Maliens tant sur le plan social que politique.
Conjurer le malaise démocratique
La deuxième raison est politique. Goïta chemine vers la réhabilitation du débat démocratique dont les partisans sont considérables dans la société malienne. Il renoue avec l’idée d’une société soucieuse de liberté d’expression, héritée des premiers scrutins électoraux des années 1990. Ce Mali-là conserve encore les germes d’une démocratie qui résiste au déballage des affaires publiques et au déni démocratique.
A propos d’élections, Goïta “[…] a invité les membres du gouvernement à créer les conditions nécessaires à l’organisation d’élections transparentes et apaisées qui devront mettre un terme à la Transition“. Le mot est lâché : mettre un terme à la Transition.
Dorénavant, Goïta compose avec le jeu démocratique. Il concède même que le retour à l’ordre constitutionnel reste une des issues à la sortie de crise. La politique reprend ses droits. Les Maliens pourront exprimer leur choix sur les différents candidats à venir grâce au vote, un droit constitutionnel, réaffirmé lors du scrutin référendaire du 18 juin 2023. Bientôt une IVe République opérante pour conjurer notre malaise démocratique.
Maïga, un miroir pour la société malienne
Ces deux raisons, politique et sociale, ont poussé le président Goïta à opérer un changement de cap, celui de l’apaisement, un nouveau logiciel dont le développement est confié au nouveau Premier ministre, son frère d’armes, le général Abdoulaye Maïga.
Bye-bye les discours clivants. Place à l’action. Certes, la Transition se militarise. Mais, la confiance entre frères d’armes serait la clef pour rebooster l’économie et redonner du sens à la gouvernance. Le défi de Maïga est d’être un miroir pour la société malienne, reflétant l’image d’une gouvernance raisonnée.
A l’image d’un soignant veillant au bon dosage du produit à administrer à son patient, Maïga doit sauver le Mali. Ce sera un grand pas vers l’avenir du Mali. Cela veut aussi dire que les portes du Mali démocratique rouvrent pour apaiser le climat sociopolitique. Une nouvelle séquence de la Transition qui doit aussi voler au secours des Maliens en insécurité alimentaire, physique, etc.
Sachant bien que le Mali n’est pas seul, les changements du nouveau gouvernement inciteraient nos voisins burkinabè, guinéens et nigériens à nous emboîter le pas dans le respect de l’Etat de droit. Et ça, c’est bon pour le moral des populations.
Mohamed Amara
Sociologue