Déficit de pollinisation dans les vergers d’azrou et conseils pour son amélioration

Par Prof Hmimina M, Mamou A, Lhamri S, Oulaidi B, Oulaidi Y. Progressivement, l’agriculture dans la région d’Azrou s’est diversifiée, passant de la culture traditionnelle de céréales et légumineuses aux cultures commerciales supposées à forte valeur ajoutée : pommier, pêcher, prunier, kaki, cerisier…. Cependant, cette mutation de l’agriculture de subsistance en culture commerciale pose quelques imprévus […]

Déficit de pollinisation dans les vergers d’azrou et conseils pour son amélioration
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Par Prof Hmimina M, Mamou A, Lhamri S, Oulaidi B, Oulaidi Y. Progressivement, l’agriculture dans la région d’Azrou s’est diversifiée, passant de la culture traditionnelle de céréales et légumineuses aux cultures commerciales supposées à forte valeur ajoutée : pommier, pêcher, prunier, kaki, cerisier…. Cependant, cette mutation de l’agriculture de subsistance en culture commerciale pose quelques imprévus pour l’amélioration de la productivité de ces nouvelles cultures. Parmi ces impairs figurent les maigres récoltes pomicoles dues au manque de pollinisation en dépit d’un bon état végétatif et d’une satisfaisante apparente floribondité. Des témoignages de cet état ont été observés ces dernières années dans divers vergers grands ou petits de la région. Nos observations répétées révèlent que ce revers peut se produire, outre par action de certains ravageurs et maladies bien connus, pour diverses autres raisons, notamment la rareté des insectes pollinisateurs, l’absence de ratio approprié de pollinisateurs, les facteurs climatiques et les besoins en eau, la plantation de variétés fruitières auto-incompatibles… Parmi cet assemblage de facteurs, tout aussi importants les uns que les autres, la rareté des insectes pollinisateurs naturels et le ratio approprié de pollinisateurs sont les facteurs clés dont j’exhorte les producteurs à en prendre vite conscience. Pour souligner l’importance de la pollinisation au niveau mondial, sa valeur économique annuelle est estimée à 153 milliards de dollars, ce qui équivaut à 9,5% de la production agricole mondiale uniquement pour la partie alimentation humaine. Les présentes observations, conduites sans méthode précise ni référence à une étude organisée, nous permettant d’évaluer efficacement l’effet des multiples variables sur les mesures de performances des vergers, ont donc été suivies librement pour comprendre le problème de la pollinisation et les stratégies pour la gérer. Nous exposons ci-après les facteurs qui tous jouent un rôle tout aussi important les uns que les autres, comme on va le voir sur la production, et fusionnent en elle tous les obstacles, qui raisonnablement maitrisés contribueraient sans coup férir à satisfaire les exigences d’une bonne récolte fruitière. Baisse de la productivité du pommier Dans la région d’Azrou, le rendement moyen en pommes varie de 10 et 20 tonnes par ha. Ces chiffres sont bas par rapport au rendement moyen de 30 tonnes dans d’autres régions horticoles. Plusieurs facteurs ont été identifiés comme affectant la productivité dans cette région. Les motifs sociaux, physiographiques et physiologiques sont pour la plupart bien compris, cependant, l’importance de la pollinisation pour la garantie de la production et de la qualité des pommes est généralement moins bien imaginée. Occupés par les grands problèmes d’eau, de grêle, de carpocapse, de tavelure et d’acariens, les arboriculteurs considèrent la pollinisation comme secondaire. Dans cette région, les insectes pollinisateurs reçoivent peu d’attention par rapport aux facteurs abiotiques, bien qu’il semble que ce soit le facteur le plus important de la baisse de productivité ou pour ainsi dire le chaînon manquant permettant de saisir le lien entre pollinisation et production. Ainsi, bien que les arboriculteurs fassent tout leur possible pour dominer les agents climatiques grevant la production, ils sous-estiment presque toujours la quotepart de la pollinisation. Nous leur rappelons pour l’occasion le fort lien entre arbres et pollinisateurs et qu’une pollinisation inappropriée réduit non seulement le tonnage en provoquant une mauvaise nouaison, mais augmente également la chute précoce des fruits et mène à des produits de qualité commercialement déplaisante. Ainsi, sur un plan plus agronomique, lors d’une rupture entre pollinisateurs et floraison, c’est la récolte qui est en jeu. Et, comme on va le voir, la pollinisation représente la première étape du processus de production. Sans avoir pour prétention d’apporter une pierre nouvelle à cet édifice, ni même d’en éprouver toutes les facettes, notre contribution vise plus simplement à saisir la particularité de la liaison quant aux rapports institués entre insectes et végétaux et faire ressortir la figure économique qui en découle. Problème de ratio et de répartition des arbres pollinisateurs dans les vergers La pollinisation a été, à n’en pas douter, un élément indispensable au développement de la production agricole; celui-ci n’a pu être assuré qu’au prix de l’insertion contrôlée des insectes dans les techniques de production. De par le monde, l’importance accordée à la pollinisation dans la production végétale est, faut-il le souligner, indissociable de sa dimension économique, c’est-à-dire du lien étroit existant entre le végétal et l’animal. Dans ce texte, nul besoin de s’aventurer plus loin dans le descriptif des vergers, nous nous focalisons sur la pollinisation en tant que telle afin d’en apercevoir l’ampleur et les multiples implications. Dans la région d’Azrou et certainement ailleurs, des variétés commerciales de pommes plantées par les arboriculteurs sont auto-incompatibles et nécessitent une pollinisation croisée avec des variétés pollinisatrices compatibles. En général, le besoin minimum en arbres pollinisateurs pour les pommes est de 20%, bien que la recommandation standard soit encore plus élevée (30%). Dans l’ensemble, les vergers de la zone ont moins que le besoin minimum requis de variétés pollinisatrices ; quelques-uns n’en ont pas du tout car leurs propriétaires méconnaissent la nécessité de planter des variétés de pommiers pollinisateurs ou, se croyant plus futés encore, comptent sur les voisins pour les en pourvoir. Beaucoup parmi ceux qui introduisent des sujets pollinisateurs ne les répartissent pas convenablement entre les arbres des variétés commerciales et font tout au petit bonheur la chance ou en dernier recours les nichent dans un recoin du verger. La demande pour certaines variétés prisées par le marché et l’insuffisance des terres sont les principales raisons pour lesquelles les agriculteurs ignorent la plantation de variétés pollinisatrices. En effet, les pommes provenues de variétés pollinisatrices ont une faible valeur marchande et les agriculteurs ne veulent pas occuper leurs terres pour une variété peu ou pas vendable. Beaucoup d’agriculteurs ne savent pas quelles variétés sont pollinisatrices ni quelle est la proportion de pollinisateurs à retenir dans leurs vergers. Quelles qu’en soient les raisons, le manque de proportions appropriées de variétés ayant une valeur pollinisatrice dans les vergers est aujourd’hui l’un des éléments stratégiques essentiels à prendre en compte. Nous parlons du pommier comme exemple parmi tant d’autres cultures commerciales qui nécessitent une pollinisation contrôlée pour accroître leur production et leur qualité. La production des légumes et de leurs semences est un autre secteur crucial où la gestion de la pollinisation est bien déterminante. Déclin des populations naturelles d’entomophiles 80% des angiospermes et des espèces cultivées dépendent résolument de la pollinisation par les insectes pour leur reproduction et pour nous garantir un rendement satisfaisant et une bonne qualité des récoltes. Pour l’essentiel, ce sont les abeilles qui fournissent ce service. En effet, l’abeille domestique, à elle seule, est responsable de la pollinisation de plus d’un tiers des cultures précitées. On mesure ainsi l’enjeu de lui prêter une attention toute particulière quant à sa préservation et à son bienêtre. Les plantes contribuent à l’entretien des pollinisateurs en leur fournissant le pollen en excès ou nectar. Cette relation est un mutualisme. Il existe une relation plus ou moins étroite entre la plante et l’animal capable de la polliniser. Outre l’abeille domestique, le déclin des insectes pollinisateurs naturels est le deuxième facteur le plus sérieux affectant la pollinisation des vergers et leur production. Ces cinq dernières années, leur diversité et leur population ont diminué à vue d’œil pour diverses raisons, notamment la perte de nourriture, d’habitats favorables en raison de la sécheresse, de maladies, du défrichement tous azimuts des terrains à des fins agricoles et de l’utilisation irraisonnée des pesticides. La pluie qui fait ici le beau temps, les changements climatiques affectent l’écologie des insectes auxiliaires. Partout, les agriculteurs mentionnent que dans le passé, il y avait plus d’insectes tels que les abeilles sauvages et domestiques, les bourdons, les papillons, les mouches … pendant la floraison des arbres fruitiers, devenus à présent presque occasionnels. Les agriculteurs reconnaissent l’utilisation de pesticides comme principale cause de la perte d’insectes pollinisateurs naturels (Cf. articles : Hmimina M, Pollinisation du verger : directives pour une meilleure utilisation des abeilles, Agriculture du Maghreb, Juin 2017. Hmimina M. la biodiversité : mythes ou réalités, Agriculture du Maghreb, Novembre 2024). Conditions climatiques aléatoires La troisième raison, affaiblissant la pollinisation, est le changement climatique dont procède la sécheresse qui sévit malencontreusement dans le pays depuis maintenant six ans. Les arboriculteurs d’Azrou vivent péniblement l’alourdissement des mauvaises conditions climatiques pendant la période de floraison des pommiers (besoins en en froid non satisfaits, gelées, orages de grêle, températures élevées ou top basses pour la saison qui endommagent les fleurs et freinent l’activité des pollinisateurs). La combinaison de ces éléments désavantage la pollinisation et se solde par une baisse de la nouaison des fruits et des récoltes. Le vent est l’agent principal du transport du pollen. En période pollinique, lorsqu’il y a du vent, les grains de pollen se déplacent sur de grandes distances et restent plus longtemps en suspension dans l’air. Mais lorsque c’est le chergui qui souffle, la situation s’inverse. Le temps devient chaud et sec et les grains de pollen, libérés rapidement et en grande quantité dans l’air, se dessèchent prématurément. Contrairement à la pluie qui aura tendance à faire tomber le pollen au sol, l’orage fragilise les grains de pollen. Organisation et directives pour la pollinisation des vergers : quel programme d’action ? Dans la région explorée, la productivité de certaines variétés a chuté de manière si drastique que des agriculteurs ont été contraints, au lieu de recourir à des solutions idoines, de les arracher purement et simplement pour improductivité. Nous citons le cas des Gala pollinisées par Golden, Granny Smith, Rouge Delicious … Nous exposons la manière de polliniser les vergers pour en souligner les zones d’ombre, et pour mieux progresser dans la pratique que nous avons précédemment évoquée. La gestion de la pollinisation des pommeraies doit inclure dès le départ la plantation de différentes variétés de pollinisateurs, le respect du ratio d’arbres pollinisateurs et le renforcement et la protection des insectes vecteurs qui à l’occasion de leurs déplacements et de leur nourriture transportent des grains de pollen des anthères mâles d’une fleur vers le stigmate. Pour les producteurs qui auraient oublié cet impératif, il est temps – et vaut mieux tard que jamais- de tenter d’augmenter la proportion de pollinisateurs dans leurs vergers, soit en remplaçant carrément certains arbres de la variété principale par des pollinisateurs, soit en y surgreffant des boutures pollinisatrices. La greffe semble plus profitable car les greffons produisent des fleurs plus rapidement que les arbres fraîchement plantés. Et comme il faut au moins quatre à cinq ans aux arbres pollinisateurs nouvellement plantés pour produire des fleurs, contre deux à trois ans aux greffons, les producteurs doivent recourir pour cette période creuse à la pollinisation par bouquets comme solution à court terme. Pour cela, des branches pollinisatrices en fleurs, prélevées ailleurs, seront fagotées en petits bouquets et accrochées aux arbres de la variété principale, leurs bases étant enserrées dans des sacs en plastique remplis d’eau pour les garder le plus longtemps fraîches. L’autre recette pour polliniser les vergers est l’embauche d’abeilles domestiques. Cet insecte est le pollinisateur le plus répandu à travers le monde et il en existe une diversité impressionnante d’espèces. L’espèce Apis mellifera, appelée aussi abeille sociale, domestique ou mellifère passe l’hiver en communauté et dès les premiers beaux jours, les ouvrières quittent leurs ruches pour aller butiner avec une capacité d’intervention sans égal et une fidélité sans faille aux fleurs. Cela veut dire, que lorsqu’une butineuse commence sa tournée par une fleur de pommier, par exemple, elle va ensuite exclusivement chercher et se délecter du nectar de la même variété de fleurs alentour. L’efficacité pollinisatrice est encore améliorée par la communication très développée entre abeilles. Ainsi l’efficacité de la pollinisation par l’abeille est accrue par rapport aux autres espèces entomophiles, chez lesquelles on n’observe pas nécessairement ce même comportement. De manière générale, les arboriculteurs d’Azrou s’accordent à dire que la pollinisation est à prendre en bonne part dans la production arboricole. Quelques-uns l’emploient pour renforcer le nombre d’insectes pollinisateurs dans leurs vergers. D’autres élèvent leur propre cheptel apicole tandis que d’autres invitent les apiculteurs de leur connaissance à leur en fournir. La location des abeilles à des fins de pollinisation n’est pas encore passée dans l’usage courant ou entrée dans les mœurs des apiculteurs. Cela s’explique principalement par le fait que l’apiculture a toujours été pratiquée comme une occupation additionnelle régénérant quelque revenu par le miel et non par la pollinisation. De la sorte, beaucoup de petits apiculteurs, tout farcis de phrases compassées et de sentences banales, croient connaître mieux que quiconque le métier d’apiculteur et pensent produire un miel unique en son genre, gouleyant, coruscant, introuvable ailleurs, digne des palais les plus exigeants. Certains font de leur miel l’ultime alicament associé au culte de la santé parfaite, cela peut s’allonger considérablement si l’on ajoute les revendications et les pratiques culturelles relatives à la lutte contre le vieillissement, à l’augmentation des performances humaines (ﺪﺍﺀ ﻟﻜﻞ ﻔﻳﻪ ﺪﻮﺍﺀ ﻮ حر عسڶ). Malheureusement ce miel pharmaceutique et souvent bien artificiel et frelaté. Et il suffit de peu d’expérience pour leur prouver toute l’insuffisance de leur savoir-faire et la vanité de leurs prétentions. En effet, si la récolte du miel est une source antique de profit immédiat et élémentaire, la pollinisation est une dette qui a la spécificité de ne jamais pouvoir être remboursée. L’avilissement de la biodiversité et la monoculture doivent pousser les arboriculteurs de notre temps à s’y tourner et être disposés à en jouer pleinement. C’est pourquoi nous nous concentrerons dans ce qui suit sur les approfondissements touchant à la liaison arboriculture-apiculture et les procédés pour apporter quelque amélioration à ce qui se fait. Comment faire pour parvenir à une bonne pollinisation ? Sans craindre de nous répéter, sans la pollinisation, il n’y aura presque pas ou peu de fruits. Facteur déterminant de la production agricole, il s’agit de voir comment rendre « la pollinisation elle-même », c’est-à-dire l’ensemble des processus propres au transfert de pollen, désormais au cœur de la production agricole, réalisable et routinière, comme d’ailleurs toutes les opérations phytotechniques (taille, fertilisation, éclaircissage, irrigation, protection…). Comprendre la complexité du système et ses atouts, c’est avancer des propositions pour rendre service aux apiculteurs et producteurs qui en ont le plus besoin et pour qu’ils le regardent à juste titre comme des solutions à leurs problèmes. Ce rappel nous a paru une évidence car, aujourd’hui si la pollinisation est de plus en plus une technique, construite sur l’expérimentation et l’évaluation, son exercice reste pour l’essentiel un art fondé sur l’expérience. Dans ce qui suit, notre objectif est plus de décrire pour comprendre, de comprendre pour analyser et d’analyser pour proposer des solutions ajustées. La pollinisation des espèces et variétés auto-incompatibles comme le pommier requiert la présence d’arbres fournisseurs de pollen pour une fécondation croisée et d’agents pollinisateurs facilitateurs de son transfert, principalement des insectes. Une fois qu’il y a assez d’arbres pollinisateurs, l’épreuve la plus importante à réussir est de s’assurer que le colportage de pollen aura bien lieu et sera bien exécuté. Pour cela, il existe différentes manières de manager l’opération, notamment par l’utilisation d’abeilles domestiques, l’élevage et l’utilisation de pollinisateurs sauvages et par la pollinisation manuelle en vogue dans certains pays asiatiques qui vivent le problème depuis un certain temps. Pour surmonter les contraintes liées à l’emploi des abeilles, principal instrument de la pollinisation rappelons-le, la première étape est la vulgarisation agricole pour impliquer apiculteurs et arboriculteurs dans les efforts de développement horticole. Étant essentielle à la production fruitière, la pollinisation devrait être incorporée dans les projets de développement horticole comme une approche immanquable à double bénéfice et certainement pas comme la cinquième de la charrette à laquelle on pense après coup. La deuxième étape consiste à changer un état d’esprit ou une croyance au sujet de la pollinisation qui freine d’une manière ou d’une autre son essor et à avertir sur son importance pour les cultures. Le raisonnement traditionnel étant que l’apiculture sert à la production de miel, son rôle dans la pollinisation des cultures est alors rarement pris en compte, mieux encore les potentialités de vol de l’abeille semblent si étendues au point que tout un chacun peut profiter de son autonomie et de son exploitabilité sans en avoir la possession. Cette finasserie est peu payante. Aujourd’hui encore, la plupart de nos services ne s’occupent de la promotion de l’apiculture que pour satisfaire la demande en miel. Ailleurs, aux États-Unis, au Japon et dans de nombreux pays d’Europe, … on recourt aux abeilles pour polliniser des cultures telles que les pommes, les amandes, les poires, les prunes, les concombres, les melons, les pastèques et diverses baies. La figure 1 illustre la différence manifeste de rendement entre les types de pollinisation sur la qualité et la quantité des fraises. Pour mémoire, aux États-Unis, précisément dans le New Jersey, les premières colonies d’abeilles (Apis mellifera) ont été louées pour la pollinisation des pommiers en 1909. En revanche, dans les régions de l’Asie du Sud et du Sud-Est, la location de colonies pour la fécondation des rosacées n’a commencé timidement qu’en 1996. Chez nous, de manière récapitulative, on peut observer que l’arboriculture est fortement ancrée dans des valeurs familiales, traditionnelles, mais à plus d’un siècle plus tard, le louage des abeilles aux fins de pollinisation, semble encore inconnu. Il parait nécessaire alors de changer la façon de considérer l’apport des abeilles mellifères en tant que recommandables pollinisatrices des cultures à divers niveaux : socio-politique, organisation, recherches apicoles et pollinisation. Les abeilles mellifères doivent être considérées d’abord comme des pollinisatrices des cultures, et complémentairement des productrices de miel. Des changements dans les plans de financement et d’investissement paraissent alors indispensables pour stimuler ce secteur d’activité. On subventionne bien les techniques d’irrigation, les machines agricoles, les filets paragrêle… alors pourquoi pas la pollinisation ? Une autre phase des états successifs à entreprendre, non moins importante, consiste à former les arboriculteurs à la planification de la mise en place des vergers et à la conduite de leur pollinisation. De nombreux agriculteurs des régions montagneuses, qui pratiquent naturellement, par atavisme, une certaine forme d’apiculture, n’ont pas assez de connaissances sur la meilleure manière de l’inclure dans la conduite de leurs plantations. Il est nécessaire de leur donner plus d’éclaircissements sur les variétés pollinisatrices appropriées, les proportions des pollinisateurs, leur disposition par rapport à la variété principale, sur les traitements phytosanitaires à proscrire et les précautions à prendre. Les apiculteurs ne sont pas disposés à fournir des colonies d’abeilles aux producteurs de pommes pour la pollinisation, en partie par crainte des effets secondaires des pulvérisations d’insecticides. Quant au nombre de colonies, elles devraient être augmentées en multipliant les essaims existants par la reproduction et l’élevage massif de reines. De tels efforts nécessitent une main-d’œuvre plus qualifiée et un appui technique avéré en matière de gestion et de vulgarisation. Un autre moyen d’augmenter le cheptel apicole pour les besoins de la pollinisation consiste à encourager des promoteurs privés à accroitre le nombre de colonies d’abeilles pour location aux agriculteurs. Une telle entente profite concurremment aux deux contractants. Étant donné le grand nombre de colonies d’abeilles nécessaires pour répondre aux besoins des vergers, il est possible que la disponibilité en abeilles domestiques excède la charge admise par la capacité environnementale d’une zone donnée. Il s’avérerait alors nécessaire de renforcer l’affouragement des abeilles par des plantes mellifères supplémentaires ou de pratiquer la transhumance. En appoint, le maintien des abeilles non mellifères pour la pollinisation, tels les bourdons et les abeilles solitaires est un excellent moyen complémentaire de fertilisation. Malheureusement leurs populations naturelles sont en déclin. Si cette tendance à la baisse des populations des pollinisateurs domestiques et sauvages qu’on observe jusqu’ici se confirme encore dans les années à venir, les conséquences économiques pourraient être désastreuses pour les arboriculteurs, les apiculteurs et l’environnement. La conservation des pollinisateurs sauvages nécessite de leur laisser suffisamment d’espace pour la nidification et l’hibernation et de réduire l’utilisation de pesticides. Aujourd’hui, les agriculteurs utilisent plus de 12 pulvérisations par saison, les risques liés aux traitements phytosanitaires peuvent être allégés par une utilisation raisonnée des pesticides et par la cooptation des pratiques de lutte intégrée contre les ravageurs. Finalement, on peut conclure que le poids économique de la pollinisation est suffisamment conséquent pour engager des moyens matériels et financiers afin de palier à une pénurie en vue. Les bénéfices de la pollinisation nous paraissent suffisamment élevés pour influer fortement sur les stratégies de conservation et les décisions d’aménagement du territoire. Figure 1. Influence des différents modes de pollinisation sur la taille des fraises (première rangée soumise à l’autopollinisation passive, seconde rangée a subi une pollinisation par le vent, dernière rangée a été pollinisée par des abeilles mellifères (Source :Morisson & Harruis) #pollinisation #pommiers #arboriculture #agriculturedurable #abeilles #insectespollinisateurs #vergers #apiculture #biodiversité #rendementagricole #changementsclimatiques #pollinisationcroisée #économiesolidaire #écoagriculture #pratiquesagricoles