6 unités industrielles, 2000 emplois, une stratégie d’exploitation durable des ressources maritimes, le groupe Mutandis fait partie des acteurs majeurs de la production de conserves de sardines au Maroc. Son patron Adil Douiri, nous dévoile sa vision pour un secteur qui fait face à mille et un défis.
Deuxième acteur marocain dans la conserve de sardines, Mutandis contribue à hauteur de 12% des exportations nationales dans ce segment de produits. Quel est le secret de cette progression aussi rapide que spectaculaire et quels sont vos objectifs et futurs challenges en vue de maintenir et de renforcer cette progression ? Le Maroc est le leader mondial de la production de conserves de sardines. Le 2ème pays est la Thaïlande et le 3ème est la Chine. De ce fait, la conserve de sardines marocaines est exportée partout dans le monde. Cette industrie crée beaucoup d’emplois dans notre pays (elle est très manuelle et peu mécanisée) et génère d’importantes recettes en devises. Cependant, les pouvoirs publics doivent s’impliquer fortement pour orienter la ressource disponible (la capture maximale annuelle est d’environ 1 million de tonnes) vers l’usage le plus générateur d’emplois. Certes, il faut du courage politique et du volontarisme, mais c’est à ce prix que l’on maximise l’emploi. Or, à ce jour, une partie importante de la ressource pêchée est tout simplement congelée puis exportée vers les usines d’autres pays pour y être transformée là-bas. C’est ridicule d’utiliser la sardine marocaine pour créer des emplois en Afrique du Sud, au Pérou ou ailleurs. Donc : un peu de courage s’il vous plait les pouvoirs publics ! nous privilégions les pays à très fort pouvoir d’achat et nous évitons au maximum les guerres des prix et les appels d’offres. S’agissant de Mutandis, nous avons 6 usines dont 4 de conserves (Safi et Agadir), 1 de préparation et 1 d’hydrolysats (protéines à forte concentration extraites de la sardine), les 2 dernières étant à Dakhla. Ces usines, plus les deux bateaux de pêche, emploient environ 2000 personnes. Notre stratégie vise avant tout à valoriser au maximum une ressource rare et limitée : nous possédons nos propres marques, nous privilégions les pays à très fort pouvoir d’achat et nous évitons au maximum les guerres des prix et les appels d’offres. L’Afrique avec 50% de parts d’exportations constitue le principal débouché de votre production à l’export, comment jugez-vous l’évolution du marché africain des points de vue quantitatif et qualitatif et quelle est la marge de progression de ce marché dans un avenir proche et moyen ? Nous avons trois marques principales : Season aux USA, Anny en Afrique et Marine au Maroc qui débute. S’agissant d’Anny, nous avons la chance de posséder la marque la plus forte en Afrique Centrale (Congo, RDC, Rwanda, Burundi, Ouganda…), région où elle est considérée comme un produit très qualitatif, premium, par rapport à la concurrence. Ce qui nous permet de la vendre plus cher et de justifier l’allocation de poisson pour cette marque et pour cette région. La tendance à l’avenir sera de monter en gamme en introduisant des produits plus sophistiqués sous la marque Anny, pour être certains de valoriser au maximum chaque kilogramme de sardine pêchée. Ce sera lent et progressif, mais c’est le chemin de l’avenir pour les producteurs marocains. La tendance à l’avenir sera de monter en gamme en introduisant des produits plus sophistiqués sous la marque Anny. Dans un contexte international de réchauffement climatique et de reflux des ressources naturelles, Mutandis en sa qualité de partenaire majeur du secteur de la pêche maritime dispose-t-elle d’une politique RSE, notamment en matière de sauvegarde des ressources et de préservation de l’écosystème marin ? Nous avons la chance que les pouvoirs publics dans ce domaine, le ministère chargé de la pêche et l’INRH, fassent un excellent travail scientifique de veille, afin d’assurer la stabilité et la pérennité de la ressource. Il ne s’agit pas d’une politique RSE de l’entreprise, il s’agit d’une politique d’Etat. Il est de la responsabilité collective de nous assurer que les quantités pêchées ne nuisent pas à la reproduction de la ressource et permettent au minimum sa stabilisation et idéalement son développement. Les mesures de la biomasse (quantités de poisson sous l’eau) effectuées par l’INRH, l’identification et la surveillance satellitaire de chaque embarcation sont régulières et assez exhaustives, ce qui nous rassure pour l’avenir. Il suffit de regarder une photo satellitaire des navires pêchant le pélagique le long des cotes marocaines, puis de la comparer avec le chaos qui semble régner au large d’autres pays, pour se féliciter du travail des autorités marocaines. Notre pays n’hésite pas à ajuster régulièrement les quantités autorisées, les périodes de pêche ainsi que les zones de pêche autorisées. Et c’est très bien comme ça.