Prospective. L’Institut du Groupe CDG (Caisse de dépôt et de gestion) vient de brosser un tableau pour l’année 2025 concernant les performances du Maroc et l’économie nationale sur la base des analyses d’experts lors d’un webinaire organisé par le même Institut. Les détails.
Les enjeux et perspectives économiques pour l’année en cours ont été au centre d’un webinaire organisé par l’Institut du Groupe CDG avec la participation d’experts en la matière. Selon un rapport réalisé par les auteurs à cette occasion, le Maroc aborde l’année 2025 avec plusieurs enjeux clés concernant sa relance économique et sociale, notamment la stabilité macroéconomique, la transformation industrielle et agricole, ainsi que l’inclusion sociale. «Il est essentiel de maintenir une vigilance constante sur le modèle de financement de la relance économique, en particulier sur l’évolution de la masse monétaire, le financement en monnaie étrangère et les avoirs officiels de réserve. Une attention particulière doit également être portée à la création d’une croissance véritablement inclusive, afin que les bénéfices de cette dynamique profitent à l’ensemble des citoyens et contribuent à leur bien-être», lit-on dans le compte rendu, précisant que le Maroc bénéficie d’un cadre macroéconomique stabilisé, avec des finances publiques maîtrisées et une dette qui se stabilise. La croissance économique pour 2025 est estimée à 3,7% pour les secteurs non agricoles, soutenue par une inflation maîtrisée à 2%. Cependant, des risques demeurent, notamment liés à la pluviométrie et à l’évolution de la conjoncture internationale, ce qui nécessite une préparation aux transformations structurelles pour accélérer la croissance du revenu national et promouvoir le développement social», ajoute la même source. Pour les experts, il est urgent de mettre en œuvre la nouvelle stratégie de développement industriel du pays, ainsi que de transformer le secteur agricole pour réduire la dépendance à la variabilité climatique. Les réformes doivent également être accélérées dans des domaines clés tels que la finance, la concurrence, l’environnement des affaires et, surtout, le capital humain. «Un focus particulier sur la formation professionnelle, l’enseignement supérieur et la recherche-développement est essentiel pour promouvoir l’innovation et renforcer la compétitivité du Maroc, notamment en Afrique et en Europe», précise-t-on. Par ailleurs, il est question de l’inclusion des jeunes dans le processus de développement considérée comme une priorité, car la fenêtre démographique du Maroc se refermera d’ici 2040. «Une politique d’inclusion visant à mieux accompagner, orienter et former les jeunes est cruciale pour exploiter pleinement le potentiel humain du pays. De plus, les réformes doivent viser la réduction des inégalités, l’amélioration du niveau de vie et la promotion d’une économie résiliente et inclusive», indique le rapport.
Vers un Maroc «émergé» d’ici 2040
Selon le document de l’Insitut CDG, «Emerger» se dit d’un phénomène qui s’impose à l’attention par sa valeur. Un pays émerge lorsqu’il se démarque de la masse des pays sous-développés. «Le Maroc se distingue par ses performances économiques, comme indiqué dans le dernier classement des pays émergents que l’Institut Emergence publie chaque année et dans lequel le Maroc est classé en tête des pays africains en 2024. Depuis les années 2000, la politique économique du Maroc a permis une ouverture sur l’extérieur et une accélération de l’industrialisation, notamment grâce aux investissements directs étrangers dans des secteurs comme l’automobile et l’aéronautique. Cela a contribué à diversifier et sophistiquer l’économie marocaine, l’intégrant davantage dans l’économie mondiale. Cependant, la productivité du pays reste encore inférieure à celle des pays «émergés », mettant en évidence la nécessité de franchir un nouveau cap», explique-t-on. Et d’ajouter: «L’un des principaux défis du Maroc réside dans l’augmentation de sa productivité, encore largement inférieure à la productivité de pays «émergés». Cela peut être expliqué par plusieurs facteurs, notamment un tissu économique dominé par des PME peu compétitives à l’international, contrairement aux grandes entreprises mieux intégrées dans les chaînes de valeur mondiales et un défi lié à l’innovation technologique, rendant difficiles une diversification économique et une montée en gamme industrielle». Selon les experts, «le Nouveau modèle de développement, bien que porteur d’une vision ambitieuse, ne s’est pas encore traduit en une feuille de route concrète et opérationnelle. Le risque est que cette vision reste théorique sans une mise en œuvre efficace. Pour y remédier, il est important d’adopter une approche par plans quinquennaux permettant d’assurer une cohérence entre les politiques sectorielles et les objectifs nationaux et de mettre en place une planification décennale pour fixer des jalons clairs sur la transition vers un modèle de croissance inclusif et durable».
Bilan 2024
Le rapport, grâce aux analyses des experts impliqués, dresse également le bilan de l’année passée. «En 2024, la croissance économique du Maroc a été estimée à 3,3%, niveau légèrement inférieur à celui de 2023 (3,4%), mais qui témoigne de la résilience de plusieurs secteurs d’activité face aux défis structurels, notamment la persistance de la sécheresse et la montée du chômage. Le principal frein à la croissance en 2024 a été la sécheresse, qui s’installe depuis quelques années. En 2024, la campagne céréalière s’est située autour de 31,2 millions de quintaux, l’une des plus mauvaises depuis 2007. Cette situation a entraîné une contraction du secteur agricole estimée à -1,8%, impactant un secteur qui fait vivre près du tiers de la population marocaine». Une situation qui contraste avec une autre marquée par le dynamisme du secteur secondaire. «A l’inverse, le secteur secondaire a connu une année exceptionnelle. Le taux de croissance de ce dernier devrait se situer autour de 3% au lieu de 1,3% l’année précédente. Depuis que Bank Al-Maghrib suit le taux d’utilisation des capacités de production qui renseigne sur l’état des activités secondaires, ce taux a atteint un record de 77,6% illustrant la forte activité du secteur. L’indice de production industrielle, quant à lui, a progressé de 9,2%, reflétant une dynamique positive dans les activités manufacturières. Le secteur de la construction a également montré des signes de reprise. Après une quasi-stagnation en 2023 (-0,4%), le taux de croissance atteindra 2,6%. Cette dynamique est portée essentiellement par une hausse des ventes de ciment (+8,9%), des crédits immobiliers (+2%) et grâce à la redynamisation générale de l’activité du BTP», indique le document.
C’est le titre de la boiteUn secteur tertiaire en forte croissance
Economie. Selon le compte rendu du webinaire de l’Institut CDG, le secteur tertiaire, important à la fois par son poids et par son dynamisme, poursuit sa croissance et devrait la maintenir autour de 4%, grâce notamment au tourisme qui a été l’un des principaux moteurs de croissance. Après une année 2023 exceptionnelle (+23%), sa croissance en 2024 devrait se situer autour de 14,8%, confirmant l’attractivité du Maroc comme destination touristique importante. En plus des dynamiques de ses secteurs, un certain optimisme se dégage quant à la conjoncture internationale qui a permis au Maroc de maintenir son dynamisme à l’étranger. Ainsi, les exportations ont enregistré une hausse de 6,2%, portée en grande partie par le secteur automobile dont la croissance a atteint 8%. Parallèlement, les investissements directs étrangers (IDE) ont progressé de 23,7% sur les onze premiers mois de 2024. Cette évolution s’explique par l’amélioration générale de la conjoncture internationale, notamment du côté de la demande extérieure, dont la croissance a été estimée à 2,2% après une contraction de 1,1% en 2023.