Après plusieurs mois d’absence, Mahmoud Dicko, l’influent imam et figure incontournable de la scène politique malienne, s’apprête à rentrer au Mali depuis l’Algérie. Ce retour annoncé suscite de nombreuses interrogations quant à son impact dans un contexte politique tendu. Une question persiste : Mahmoud Dicko fait-il toujours peur au régime militaire en place ?
Mahmoud Dicko est connu pour son rôle majeur dans les manifestations populaires de 2020, qui ont précipité la chute du régime d’Ibrahim Boubacar Keïta. Figure charismatique pour certains, il incarne pour beaucoup une voix critique face à la gouvernance actuelle. Par son influence religieuse et politique, il a mobilisé des milliers de partisans autour de revendications dénonçant la corruption, la mauvaise gouvernance et l’insécurité croissante dans le pays.
Depuis son départ pour l’Algérie, certains observateurs ont vu dans cet éloignement une volonté de se retirer temporairement du tumulte politique, tandis que d’autres y ont perçu un « exil stratégique » face aux tensions avec les autorités militaires.
Un retour chargé de symboles
Le retour de Mahmoud Dicko survient à un moment où les militaires au pouvoir font face à des défis majeurs. L’insécurité reste omniprésente dans de nombreuses régions du pays, marquées par une recrudescence des attaques terroristes, tandis que les sanctions économiques internationales continuent d’asphyxier l’économie nationale. Par ailleurs, le régime cherche à consolider son autorité en vue des élections prévues pour 2025.
La réapparition de l’imam de Badalabougou sur la scène publique pourrait raviver les tensions politiques. Ses critiques acerbes envers la transition militaire, qu’il accuse de ne pas répondre aux aspirations du peuple malien, risquent de mobiliser à nouveau ses partisans.
Bien que Mahmoud Dicko ait toujours prôné le dialogue et la paix, sa popularité et son franc-parler inquiètent les autorités. Son retour pourrait être perçu comme une tentative de réorganiser l’opposition ou d’influencer les débats sur la transition. Pour le régime militaire, le défi sera de contenir son influence sans en faire un martyr, ce qui risquerait de renforcer davantage sa base de soutien.
Cependant, Mahmoud Dicko devra lui aussi relever plusieurs défis. Ses longues absences et son apparent retrait de la sphère politique ont peut-être affaibli son réseau d’influence. De plus, dans un contexte marqué par les frustrations socio-économiques, l’opinion publique pourrait attendre de lui des solutions concrètes plutôt qu’un simple discours critique.
Le retour de Mahmoud Dicko constitue un véritable test pour le régime militaire. S’il parvient à rassembler autour de lui une opposition crédible, il pourrait redevenir une figure incontournable des débats sur l’avenir politique du Mali. Cependant, son succès dépendra de sa capacité à traduire son influence spirituelle en actions politiques tangibles.
Une chose est certaine : ce retour ne laissera personne indifférent, ni au sein de la classe politique, ni parmi les citoyens maliens, en quête de stabilité et de justice.
Founekè Djibril