Face à la hausse des prix de certains médicaments, le ministère de la Santé envisage de nouvelles mesures à court et à long termes afin d’alléger le fardeau des dépenses, en particulier pour la classe moyenne.
Déjà éprouvée par la hausse vertigineuse des coûts de la vie, la classe moyenne peine à se procurer des médicaments dont les prix n’ont cessé d’augmenter au cours des trois dernières années. Une situation inquiétante qui bloque l’accès aux soins pour une large part de la population, alors que le gouvernement s’efforce de généraliser la couverture sociale à 22 millions de personnes. "Les prix de certains médicaments indispensables ont augmenté de façon surprenante, dépassant largement les prix pratiqués sur le marché international. Les familles rencontrent des difficultés pour s’en procurer, ce qui risque de freiner leur parcours de traitement", s’inquiète un pharmacien à Salé. En effet, cette situation, qualifiée d’inacceptable par le pharmacien, pèse lourdement sur les ménages marocains, limitant l’accès aux traitements et accentuant les inégalités en matière de santé. Un récent rapport du Réseau marocain de défense du droit à la santé et à la vie a également révélé des écarts de prix allant du simple au triple, voire plus, entre les prix pratiqués dans les pays d’origine de certains traitements et ceux du marché marocain. Cette réalité n’échappe pas au ministre de la Santé et de la Protection sociale, Amine Tahraoui, qui envisage de revoir les pratiques tarifaires appliquées aux médicaments au Maroc. Lors d’une session de discussion au sein de la Commission de l’Enseignement, de la Culture et des Affaires sociales, le ministre a exprimé la volonté de son département de revoir les critères de fixation des prix, y compris les marges de production et les bénéfices attribués aux distributeurs et aux pharmaciens, selon le décret du 13 décembre 2013. De plus, le ministre a souligné la nécessité de poursuivre l'amélioration des politiques pharmaceutiques afin d'assurer la disponibilité de médicaments de haute qualité à des prix accessibles pour tous les citoyens. Nouvelle baisse en vue pour plus de cent médicaments En ce qui concerne les tarifs des médicaments pratiqués, ils sont fixés sur la base d’études comparatives avec 20 pays, dont la France, l'Espagne et l'Arabie Saoudite, dans le but de garantir l’équilibre entre les coûts de fabrication et les intérêts des citoyens. Ces tarifs ont été réduits de manière notable grâce aux exonérations fiscales sur un total de 4.500 médicaments dans le cadre de la Loi des Finances de 2024. Pour améliorer l’accès aux soins, Amine Tahraoui a indiqué qu'une nouvelle décision est en préparation et sera rendue publique dans les prochains jours, visant à réduire les prix d’environ 169 médicaments, dont ceux utilisés pour les maladies chroniques, afin d’alléger le fardeau des dépenses de médicaments pour les ménages. Cependant, la solution optimale pour surmonter ce problème reste de promouvoir la fabrication locale, notamment des médicaments génériques, afin d’accroître la capacité nationale de cette industrie et de réduire la dépendance du Maroc au marché international. En attendant l’aboutissement de cette vision et dans le souci d’améliorer la gestion des stocks de médicaments, le ministère développe également un système informatique centralisé pour surveiller et distribuer efficacement les médicaments à travers le pays, renforçant ainsi la capacité à répondre rapidement aux zones en pénurie. Les pratiques de certains monopoles constituent également une raison de l'augmentation des prix des médicaments, selon Fouzi Lekjaa, ministre délégué chargé du Budget, qui avait expliqué que ces derniers maintiennent artificiellement des prix élevés au détriment de la population. Ces pratiques nuisent à l'accessibilité des médicaments et freinent les efforts pour construire une industrie pharmaceutique nationale compétitive. Des médicaments nécessaires mais rares En plus de la cherté des prix médicamenteux, le marché national souffre également de la rareté de certains médicaments utilisés dans le traitement des maladies chroniques, indispensables aux patients souffrant de problèmes cardiaques et d'insuffisance rénale. Une réalité que les pharmaciens attribuent en partie à la demande croissante pour ces médicaments, mais aussi aux mécanismes d'achat et de vente régis par le marché international. Le ministre a expliqué également que cette pénurie est due aux problèmes d'approvisionnement, liés notamment à la disponibilité des matières premières, au processus de fabrication des médicaments ou encore à leur distribution auprès des pharmacies, impactant ainsi le processus d’importation par les entreprises locales. D'où la priorité donnée par le gouvernement à renforcer la fabrication locale de médicaments, en particulier les médicaments génériques, dans le but de réduire la dépendance à l'importation et de renforcer la sécurité sanitaire. Parmi les objectifs tracés pour parvenir à une souveraineté dans le secteur pharmaceutique figure la mise en place d’un stock de réserve stratégique, largement disponible, pour pouvoir gérer les différentes crises. Cela fait écho à la loi 17-04 relative à la pharmacie et aux médicaments, qui garantit l'approvisionnement en médicaments nécessaires aux patients au Maroc, en surveillant et en suivant le marché international des médicaments en termes de fabrication, de stocks ou d'importation. Cette loi vise également à protéger les patients et leur santé, en assurant un approvisionnement suffisant du marché national en médicaments, avec un stock d'au moins trois mois. Dans cette optique, le Maroc a créé l'Agence Marocaine des Médicaments et des Produits de Santé, chargée de l’exécution des orientations stratégiques de la politique de l’État visant à assurer la souveraineté médicamenteuse et à garantir la disponibilité, la sûreté et la qualité des médicaments et produits de santé.