Abdellatif Jouahri, wali de Bank Al-Maghrib, et Nezha Hayat, présidente de l’Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC).
Systèmes financiers : Le Symposium régional de haut niveau sur la stabilité financière a abordé des défis multiples, allant des risques climatiques à l’essor des nouvelles technologies financières, soulignant l’importance de la coopération régionale pour renforcer la résilience des marchés financiers africains face à un environnement incertain.
Les défis complexes et les risques pesant sur la stabilité financière ont été passés au crible lors de la 4ème édition du Symposium régional de haut niveau sur la stabilité financière. La finalité étant de renforcer les moyens de coopération dans les domaines de stabilité financière et de supervision macroprudentielle. Cette édition placée sous le thème «Stabilité financière en Afrique à l’épreuve des incertitudes géoéconomiques et des risques émergents» se veut la première à l’ère postpandémie. L’occasion étant de mettre en lumière les défis complexes auxquels les systèmes financiers sont confrontés depuis 2020. A cela s’ajoutent la fragmentation géoéconomique, la montée de la digitalisation, les dynamiques démographiques, la récurrence des phénomènes climatiques extrêmes et la résurgence des pressions inflationnistes. Autant de facteurs qui reconfigurent l’échiquier économique, social et financier mondial. Ces mutations ont été soulignées par Abdellatif Jouahri, wali de Bank Al-Maghrib, lors de son intervention d’ouverture. «Ces évolutions se traduisent par des niveaux élevés d’incertitudes et l’émergence de nouveaux risques complexes et difficiles à prévenir et à gérer. La prise de décisions aussi bien privée que publique devient dans un tel contexte un véritable défi», relève-t-on du gouverneur de la Banque centrale qui est également président du Comité marocain de coordination et de surveillance des risques systémiques (CCRS). M. Jouahri a également mis l’accent sur la sensibilité des régulateurs du secteur financier au Maroc au risque climatique. «Les régulateurs du secteur financier, qui s’inscrivent dans le cadre des efforts mondiaux de lutte contre les risques climatiques, ont lancé de nombreuses initiatives visant à intégrer la dimension climatique dans les stratégies, les processus décisionnels et les cadres de régulation financière», a-t-il indiqué. Et de préciser que «les manifestations du changement climatique sont claires et récurrentes dans le cas du Maroc, avec notamment les années de sécheresse, le stress hydrique aigu parallèlement à des inondations et des crues récurrentes».
Abdellatif Jouahri a rappelé dans ce sens la publication en 2021 de la directive invitant les banques marocaines à intégrer pleinement le risque climatique dans leurs dispositifs de gouvernance, de gestion des risques, et dans leurs stratégies d’investissement et de financement. On note par ailleurs l’étude sur les risques climatiques dans le secteur bancaire réalisé par la Banque centrale en partenariat avec la Banque mondiale. A cela s’ajoutent les guides publiés par l’Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC) portant notamment sur les instruments de financement durables et sur l’investissement socialement responsable ainsi que la circulaire de 2019 rendant obligatoire la publication d’un rapport environnemental, social et de gouvernance (ESG) annuel pour tous les émetteurs sur le marché des capitaux. Parmi les actions engagées, on relève également l’instruction émise par l’Acaps sur la gestion des risques financiers liés au changement climatique et à l’environnement à destination des entreprises d’assurances et de réassurances. M. Jouahri a également mis en avant les défis technologiques en mettant un accent particulier sur le développement des cryptoactifs et des monnaies digitales, rappelant dans ce sens l’approche réglementaire adoptée par les autorités marocaines en vue d’assurer une protection adéquate des usagers et des investisseurs tout en préservant les opportunités de tirer profit de ces innovations. Rappelons qu’un projet de loi encadrant les cryptoactifs est actuellement dans le circuit d’adoption.
La Banque centrale se penche également sur l’étude de l’impact des monnaies digitales à la réalisation de certains objectifs politiques publics, notamment en matière d’inclusion financière. Pour sa part, Nezha Hayat, en sa qualité de présidente de l’Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC) et présidente du Comité régional Afrique et Moyen-Orient (AMERC) de l’Organisation internationale des commissions de valeurs (IOSCO), a plaidé pour une action collective pour naviguer dans les complexités des systèmes financiers.
Une «coopération réglementaire renforcée» qui, selon la responsable, favorise un «écosystème financier résilient et inclusif répondant aux besoins de toutes les parties prenantes». «Une coordination efficace est fondamentale pour assurer la stabilité et la résilience des systèmes financiers», a-t-elle indiqué soulignant l’importance cruciale de la collaboration entre les autorités du système financier, tant au niveau national qu’international, et de la coordination comme étant un facteur fondamental de stabilité financière. « De nombreux défis menacent la stabilité des marchés de capitaux. En plus des risques tels que la concentration, l’interconnexion et le manque de liquidité, nous avons récemment été confrontés à des risques émergents liés à l’innovation financière, à la cybersécurité et au climat.
Ainsi, la coordination internationale entre les autorités des marchés de capitaux est extrêmement précieuse pour identifier, évaluer et traiter les risques », relève-t-on de Mme Hayat. Cette coordination aura ainsi pour objectif de renforcer la protection des investisseurs, de développement de marchés transparents et efficients ainsi que d’atténuer des risques systémiques.