Une économie dynamique et une population en colère: le paradoxe des États-Unis avant l’élection

Le bilan de Joe Biden et des Démocrates, en apparence très bon, est jugé sévèrement. Au point que des électeurs sont tentés de suivre Donald Trump dans une course folle à la fermeture des frontières. Il y a sûrement des moments où vous vous demandez s’il n’y a pas quelque chose qui vous échappe. Chaque […]

Une économie dynamique et une population en colère: le paradoxe des États-Unis avant l’élection
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Le bilan de Joe Biden et des Démocrates, en apparence très bon, est jugé sévèrement. Au point que des électeurs sont tentés de suivre Donald Trump dans une course folle à la fermeture des frontières. Il y a sûrement des moments où vous vous demandez s’il n’y a pas quelque chose qui vous échappe. Chaque jour, vous entendez parler de la façon dont les grandes entreprises de haute technologie des États-Unis dominent le monde. Vous voyez que l’économie de ce pays continue d’avancer à un rythme soutenu, tandis que l’Europe est à la peine. Vous constatez que la Bourse américaine bat record sur record. Et pourtant, vous entendez dire que Donald Trump est au coude à coude avec sa rivale dans les sondages. Vous entendez dire aussi que Kamala Harris prend ses distances avec le président Joe Biden et évite soigneusement de se prévaloir du bilan des quatre années passées auprès de lui. Vous entendez dire, enfin, que beaucoup de travailleurs des États qui devraient jouer un rôle clé dans l’élection du 5 novembre sont en colère contre Biden en particulier et les Démocrates en général. Et vous ne comprenez plus: comment un tel bilan économique peut-il jouer en défaveur de ceux qui sont au pouvoir depuis janvier 2021? Un paradoxe apparemment inexplicable Le paradoxe semble à première vue complètement inexplicable. Que le pays qui compte en son sein les universités les plus brillantes du monde risque de reconduire au sommet de l’État une caricature de macho, un homme qui profère contre-vérité sur contre-vérité, insulte sur insulte et se montre incapable de tenir le moindre raisonnement structuré, cela paraît tout simplement incompréhensible. On peut évidemment traiter les électeurs de Trump par le mépris et dire que l’ancien président ne séduit que les imbéciles et les plus réacs. Mais les chiffres incitent à plus de réalisme: au vu du nombre d’électeurs qui se disent prêts à voter pour lui, cela ferait vraiment beaucoup d’imbéciles et de réacs aux États-Unis. Il faut sans doute aller chercher d’autres explications ailleurs. Les succès économiques américains sont incontestables. The Economist n’a pas tort de dire qu’ils font pâlir d’envie le reste du monde, en citant quelques chiffres qui illustrent de façon frappante l’ampleur de cette réussite. En 1990, les États-Unis comptaient pour environ les deux cinquièmes du PIB du G7, le club des sept grands pays riches; aujourd’hui, ils en représentent la moitié. Leur production par tête est maintenant supérieure d’environ 30% à celle de l’Europe de l’Ouest et du Canada, et de 60% à celle du Japon; l’écart a été en gros multiplié par deux depuis 1990. Les habitants du Mississippi, État le plus pauvre des États-Unis, gagnent en moyenne plus que les Britanniques, les Canadiens ou les Allemands. Il ne faudrait pas croire que ce spectaculaire bond en avant est à imputer entièrement aux prédécesseurs de Biden. Alors que la Chine n’a pas vraiment réussi à sortir de la crise du Covid-19, les États-Unis ont au cours des dernières années creusé l’écart qui les séparait de leur challenger. Tous les pronostics sur la date à laquelle l’empire du Milieu allait passer en tête du palmarès mondial sont sans doute à revoir. Une hégémonie durable Cela peut-il durer? Tout au long de cette année, à intervalles réguliers, on a entendu dire qu’économistes et financiers s’inquiétaient d’un risque de récession aux États-Unis. Après avoir commencé à relever ses taux directeurs dès le mois de mars 2022 face aux risques d’inflation, la Réserve fédérale, disait-on, tarde à revenir en arrière et cette inaction risquait d’être fatale à l’économie. De fait, elle n’a commencé à les abaisser qu’à partir du 18 septembre de cette année, alors que la Banque centrale européenne a amorcé le mouvement dès le 6 juin. Et pourtant, la chute de l’activité tant redoutée n’a pas eu lieu. Après avoir augmenté de 1,6% (en rythme annuel) au premier trimestre, le PIB a au contraire accéléré sa hausse au deuxième, à 3% (la première estimation de la croissance au troisième trimestre doit être publiée mercredi 30 octobre). La tendance est bien au ralentissement, mais la croissance américaine resterait plus soutenue que dans les autres grands pays industriels. Selon les récentes prévisions du FMI, elle passerait de 2,9% l’an passé à 2,8% cette année et 2,2% l’an prochain. La zone euro suivrait, elle, un chemin ascendant, mais toujours à l’étage au-dessous: 0,4% de croissance en 2023, 0,8% en 2024 et 1,2% en 2025. Le Japon ne ferait pas mieux que 0,3% cette année et 1,1% l’an prochain. La Chine serait au-dessous de 5%, à 4,8% cette année et 4,5% l’an prochain, ce qui est peu pour elle. Source: https://www.slate.fr/