Ava DuVernay, figure emblématique du cinéma américain, a illuminé le Festival International du Film de Marrakech (FIFM) 2024 de sa présence. Lors d’une table ronde riche en échanges, la réalisatrice engagée a abordé des thèmes centraux comme la transmission, la justice et l’importance de raconter des histoires authentiques.
Interrogée sur son influence auprès des jeunes réalisateurs, notamment ceux issus de communautés marginalisées, Ava DuVernay a mis en lumière l’importance de la transmission et du dépassement. « Mon espoir, c’est qu’ils aillent au-delà de moi », a-t-elle confié. Pour elle, chaque réussite est une porte ouverte, non pas pour s’y arrêter, mais pour en ouvrir d’autres. « Je sais que là où je me trouve, ce sont des femmes avant moi qui ont ouvert ces portes », a-t-elle ajouté, soulignant l’importance de cette chaîne de solidarité dans l’industrie cinématographique. Les œuvres de DuVernay, qu’il s’agisse de Selma ou de Origin, sont profondément ancrées dans les thèmes de la justice et de la dignité. À la question de savoir comment elle sélectionne les histoires qu’elle raconte, elle répond simplement : « Je suis ma curiosité. » Elle explique qu’un projet cinématographique implique souvent des années de travail sur un même sujet. Par conséquent, il est impératif de s’investir dans des thématiques qui passionnent. Cette curiosité, nourrie par un intérêt sincère pour les questions de justice, guide l’essence de son travail. DuVernay a également salué le rôle crucial des festivals comme le FIFM dans la mise en lumière des voix sous-représentées. « Ces événements sont essentiels pour introduire de nouvelles perspectives dans la communauté cinématographique mondiale », a-t-elle affirmé. Le FIFM, avec son ambiance conviviale et ses opportunités d’échange, se distingue par sa capacité à réunir des cinéastes et à favoriser un dialogue enrichissant, loin de l’agitation des grands festivals internationaux.
Femmes et cinéma : une quête de justice et de dignité Lors de la discussion, Ava DuVernay a abordé des questions essentielles sur la place des femmes dans le cinéma et dans la société en général. Elle a insisté sur le fait que cette quête d’accomplissement personnel et professionnel varie selon les individus. Ce qui compte, selon elle, c’est que chacun puisse choisir librement sa voie et bénéficier du soutien sociétal nécessaire pour s’épanouir. Face aux défis du mouvement Me Too et aux discriminations persistantes sur les plateaux de tournage et dans les lieux de pouvoir, DuVernay a exprimé une opinion tranchée : eC’est le travail des hommes de trouver des solutions. » Elle insiste sur la nécessité pour les hommes de s’éduquer et de prendre leurs responsabilités pour devenir des alliés actifs dans la lutte pour l’égalité. « L’importance de la narration » : un moteur du changement selon Ava DuVernay Par la même occasion Ava DuVernay a souligné l’importance cruciale de la narration comme outil de transformation sociale. Selon elle, le pouvoir des récits réside dans leur capacité à refléter et à remodeler les réalités culturelles et sociétales : « Les histoires ont le pouvoir de changer les perceptions, de bouleverser les idées reçues et de guérir. Lorsque nous racontons des récits issus de perspectives marginalisées, nous ouvrons la voie à l’empathie et à la compréhension. » Elle a également insisté sur la responsabilité des créateurs de proposer des récits authentiques et inclusifs, « En tant que conteurs, notre rôle est de nous demander : quelle histoire n’a pas encore été racontée ? Comment pouvons-nous amplifier ces voix sans les écraser ? ». Ava DuVernay a expliqué que la narration transcende les frontières. Elle a rappelé l’importance de mettre en lumière les histoires locales sur la scène mondiale, tout en valorisant la diversité des perspectives : « Les festivals comme celui-ci sont essentiels. Ils permettent aux récits de différentes parties du monde de se rencontrer, de se confronter et de créer un dialogue global. » En réponse à une question sur l’impact de ses œuvres, notamment « When They See Us », Ava DuVernay a évoqué la puissance des récits pour dénoncer les injustices et inspirer le changement, « je n’ai pas réalisé « When They See Us » pour les récompenses ; je l’ai fait pour honorer la vérité. Des récits comme celui-là nous rappellent le travail qu’il reste à accomplir et nous incitent à agir. », a-t-elle souligné. Ava DuVernay ne se contente pas de raconter des histoires ; elle milite pour un cinéma porteur de justice et d’émancipation.