Le marché mondial des biostimulants connaît une croissance remarquable, portée par une transition vers des pratiques agricoles durables et respectueuses de l’environnement. Selon les informations disponibles, en 2022, ce secteur représentait environ 3 milliards de dollars et devrait atteindre 9,5 milliards d’ici 2032, affichant un taux de croissance annuel (TCA) de 10,5 % sur la période 2023-2032. Cette progression reflète l’intérêt croissant des agriculteurs et des gouvernements pour des solutions innovantes permettant d’optimiser les rendements tout en répondant aux exigences environnementales croissantes.
Plusieurs éléments expliquent cette forte expansion. Premièrement, la demande pour des produits agricoles durables s’intensifie face à la pression des consommateurs et aux politiques réglementaires visant à limiter l’utilisation des intrants chimiques. Les biostimulants, en tant qu’alternatives écologiques, répondent parfaitement à ces attentes. Deuxièmement, les avancées technologiques, notamment en agriculture de précision, permettent une application optimisée des biostimulants, maximisant ainsi leur efficacité et leur adoption. Enfin, la prise de conscience des impacts environnementaux de l’agriculture conventionnelle pousse de plus en plus d’acteurs à intégrer des solutions alternatives dans leurs systèmes de production.
Caractéristiques et applications des biostimulants
Les biostimulants se distinguent par leur capacité à améliorer les processus biologiques des plantes sans apporter directement de nutriments, contrairement aux engrais classiques. Ces produits se répartissent en deux grandes catégories :
– les biostimulants microbiens, tels que les rhizobiums et les mycorhizes,
– les biostimulants non microbiens, comprenant les acides humiques, les extraits d’algues et les hydrolysats de protéines.
Ces substances agissent sur plusieurs fronts : elles renforcent la résilience des cultures face aux stress abiotiques comme la sécheresse et la salinité, améliorent l’efficacité d’absorption des nutriments et optimisent la santé générale des sols.
Les principales applications des biostimulants incluent le traitement foliaire, qui permet une absorption rapide par les feuilles, le traitement des semences, qui favorise une germination uniforme, et le traitement du sol, qui enrichit la rhizosphère en micro-organismes bénéfiques. Ces méthodes offrent aux agriculteurs des options diversifiées pour répondre aux besoins spécifiques de leurs cultures et aux conditions locales.
Une dynamique géographique différenciée
Le marché des biostimulants affiche une dynamique géographique intéressante. En 2022, l’Europe représentait 40,6 % du marché mondial, avec une valeur estimée à 1,3 milliard de dollars. Cette position dominante s’explique par des politiques favorables, une forte sensibilisation aux pratiques durables et un secteur agricole avancé. L’Asie-Pacifique, quant à elle, connaît une croissance rapide, soutenue par l’augmentation de la population, la demande alimentaire et les efforts pour moderniser l’agriculture dans des pays comme la Chine et l’Inde.
Perspectives et défis
Malgré des perspectives prometteuses, le marché des biostimulants fait face à certains obstacles. En particulier dans les pays à faible revenu, le coût de ces produits par rapport aux intrants chimiques traditionnels peut freiner leur adoption. De plus, le manque de sensibilisation parmi les agriculteurs sur les avantages des biostimulants reste un défi majeur. Néanmoins, les opportunités ne manquent pas. L’innovation continue dans les formulations, en particulier pour les applications sur les semences, et les initiatives gouvernementales visant à promouvoir l’agriculture durable devraient accélérer leur adoption.
Biostimulation : une nouvelle ère agricole s’annonce
Avant de présenter les biostimulants, il faut se demander pourquoi une plante aurait besoin de biostimulants pour se développer. Et pour répondre à cette question il faut se rappeler quels sont les besoins nutritifs d’une plante. Pour assurer sa croissance et son développement, la plante a besoin d’oxygène pour assurer sa respiration, de gaz carbonique et d’énergie solaire pour réaliser la photosynthèse qui lui procure le carbone, d’eau et d’éléments nutritifs qu’elle se procure dans le sol. On distingue classiquement des éléments nutritifs majeurs : azote, phosphore, potassium, indispensables à la synthèse des constituants de la cellule végétale et des oligo-éléments : cuivre, fer, magnésium, manganèse, soufre, zinc, etc., qui participent au bon fonctionnement physiologique de la plante.
Dans le milieu naturel, c’est le sol qui procure ces éléments nutritifs, mais il convient de souligner ici le rôle fondamental joué par l’action des organismes vivants et en particulier des micro-organismes. Ces derniers contribuent à la dégradation de la matière organique et à la mise à disposition d’éléments nutritifs nécessaires à la plante. Les interactions sol, plante, micro-organismes sont particulièrement importantes dans la rhizosphère des plantes. Celle-ci correspond au volume de sol soumis à l’influence des racines de la plante ; c’est le lieu des interactions principales entre la plante et les micro-organismes telluriques d’une part et, d’autre part, des interactions entre micro-organismes eux-mêmes.
La distance à laquelle la racine d’une plante affecte les activités microbiennes est extrêmement variable ; elle dépend du type de sol, de l’espèce végétale et des activités microbiennes considérées. La racine de la plante modifie très largement certaines caractéristiques du sol telles que le pH, le potentiel hydrique, le potentiel d’oxydo-réduction, et apporte, via les exsudats racinaires, de nombreux éléments, en particulier des sucres et des acides organiques, qui stimulent les activités microbiennes et leurs interactions.
Dans les sols agricoles, les ressources en éléments nutritifs disponibles pour les plantes sont le plus souvent insuffisantes pour atteindre les objectifs de production et l’agriculteur doit recourir à la fertilisation. C’est particulièrement le cas depuis les années 50, lorsque, à l’issue de la seconde guerre mondiale, l’objectif était d’atteindre l’autosuffisance alimentaire. L’agriculture s’est spécialisée et intensifiée grâce à la mise au point de variétés hybrides à haut rendement potentiel, à l’usage intensif de pesticides organiques de synthèse, à la généralisation de l’usage des engrais et fertilisants chimiques, et à l’expansion de la mécanisation et de la motorisation. Cette intensification des pratiques, l’abandon des systèmes de polyculture-élevage sont à l’origine d’une diminution de la « qualité » des sols qui se traduit en particulier par une baisse globale de la teneur en matière organique des sols de grande culture et une diminution de la biodiversité microbienne.
Face à ce constat, pour pallier les effets néfastes engendrés par ce type de pratiques, il a été proposé d’apporter aux sols des amendements organiques et, plus récemment, des « produits biostimulants » de nature extrêmement variée. Ces biostimulants peuvent être composés d’extraits d’algues ou de plantes, de composts ou de thés de compost, de mélanges d’acides aminés, de micro-organismes, bactéries ou champignons vivants ou morts, parfois réduits à l’état de parois et dénommés « écorces de levures », etc. En aucun cas ce ne sont des engrais, ils n’apportent pas d’éléments nutritifs contribuant directement à la nutrition de la plante. L’idée qui sous-tend cet apport d’amendements organiques et de biostimulants est de régénérer la fertilité biologique du sol mise à mal par des pratiques agricoles intensives, trop peu respectueuses des communautés microbiennes dont l’activité est indispensable au bon développement des plantes.
Jusqu’à un passé récent, ces produits étaient majoritairement proposés par de petites sociétés et ne bénéficiaient d’aucune autorisation de mise sur le marché. Leurs modes d’action n’étaient pas connus et trop souvent la revendication de stimulation de la croissance des plantes n’était pas démontrée. Depuis les années 2010, cette situation s’est très nettement améliorée car, d’une part, des chercheurs s’intéressent aujourd’hui aux mécanismes par lesquels ces produits stimulent la croissance ou le développement des plantes et d’autre part, en Europe, des industriels sérieux se sont regroupés dans des associations [European Biostimulant Industry Council (EBIC) et Académie des biostimulants] visant à organiser la profession et à promouvoir les biostimulants.
Aujourd’hui, plusieurs définitions du terme biostimulant coexistent, en partie parce qu’il n’existe pas de définition précise du phénomène de biostimulation, mais uniquement des descriptions des produits biostimulants eux-mêmes. L’EBIC définit les biostimulants végétaux de la manière suivante : « Les biostimulants végétaux contiennent des substances et/ou des micro-organismes qui, lorsqu’ils sont appliqués aux plantes ou à la rhizosphère, stimulent les processus naturels pour améliorer l’absorption des nutriments, l’efficacité des nutriments, la tolérance aux stress abiotiques et la qualité des récoltes. Les biostimulants n’ont pas d’action directe contre les parasites et ne relèvent donc pas du cadre réglementaire des pesticides.
L’EBIC énumère également les effets des biostimulants: « Les biostimulants favorisent, de différentes manières, la croissance et le développement des plantes tout au long de leur cycle de vie, de la germination des graines jusqu’à la maturité. Les mécanismes en jeu incluent, mais ne se limitent pas à:
Améliorer l’efficacité du métabolisme des plantes pour accroître les rendements et la qualité des récoltes ;
Augmenter la tolérance des plantes aux stress abiotiques et leur capacité de récupération ;
Faciliter l’assimilation des nutriments ;
Optimiser l’utilisation de l’eau ;
Améliorer certaines propriétés physicochimiques du sol ;
Favoriser le développement de certains micro-organismes bénéfiques du sol.
Enfin, selon l’EBIC, les biostimulants peuvent inclure des produits contenant certains éléments nutritifs, à condition que l’amélioration de la croissance des plantes ne résulte pas d’une fertilisation directe.
Tant au niveau scientifique que commercial, le domaine de la biostimulation des plantes est un secteur d’activité qui se développe depuis peu de temps. Ainsi, beaucoup de questions restent encore à résoudre. Toutefois, avec les progrès de la science et l’évolution des technologies d’analyses de données, les modes d’actions de ces produits sont identifiés de manière de plus en plus précise. D’autre part, certains produits se développent commercialement alors que la science avait déjà une connaissance solide de l’action biostimulante générée.
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