De la parole poétique pour interroger le monde

Feu Mohamed Sektaoui Mohamed Nait Youssef Militant de la première heure,  figure  emblématique de la scène des droits de l’Homme au Maroc, Mohamed Sektaoui, directeur général d’Amnesty International au Maroc,  a passé l’arme à gauche, samedi 04 janvier 2025,  après un long combat contre la maladie. Il avait  72 ans.il est inutile de le présenter en deux mots. Feu Mohamed Sektaoui était également poète, sincère et profond. Sa parole est révélatrice où se dévoile sa vision du monde ; du militant, de l’humaniste et de l’homme créateur et sensible. La parole poétique ouvre nos yeux sur le monde, immortalise notre regard et nous rappelle l’importance de nos valeurs humaines en ces temps troublés, parfois fades. La parole poétique demeure à jamais, telle une trace. René Char disait : «Un poète doit laisser des traces de son passage, non des preuves. Seules les traces font rêver.» Chez Dar Attaouhidi, feu Mohamed Sektaoui a signé  son dernier recueil de poèmes ‘’Khalaate’’. Dans ce florilège de poèmes, le poète nous amène à des territoires inconnus, à des espaces désertiques, vastes et vides,… à des endroits isolés où les silences blancs, longs retrouvent un écho dans l’ontologie de celui qui interroge, qui médite, qui questionne l’essence de l’existence humaine. La vie n’est pas un long fleuve tranquille !  Mais, nous traversons quand même vers d’autres confins, lointains… à la recherche d’un sens, voire des sens à cette vacuité qui nous habite. Dans ce recueil, Mohamed Sektaoui interroge le non-sens, interpelle les non-dits dans un monde désorienté. Par ailleurs, ‘’Khalaate’’ est une invitation au voyage dans ce grand désert  où les temps s’arrêtent, où la présence et l’absence déchirent les tripes de celui, de ceux qui attendent. Eternel vagabond ! Dans ce vide sidéral, le poète mène une réflexion profonde sur la vie, sur le sort de l’humain et l’avenir de l’homme des temps actuels. Ce long périple poétique est aussi méditatif et spirituel. Car, dans cette espèce de noirceur, d’errance jaillit une lumière ; celle de la vie. À vrai dire, dans ce recueil, Mohamed Sektaoui vénère l’idée de la vie, de l’humain tout court. Dans sa poésie, dont l’image est puissante, créative, significative, le poète évoque les éléments de la nature : la mer, le ciel, l’eau, la terre… pour révéler ce qui demeure caché dans sa rêverie créatrice. «Le poète est celui qui connaît, c’est à dire qui transcende, et qui nomme ce qu’il connaît. », écrivait Gaston Bachelard dans «La poétique de l’espace». Toutefois, cette transcendance de la langue poétique,  laisse le poète cheminer son rêve dans une réalité instable et marquée par les doutes et des turbulences. Dans ce vide, le revenant panse ses plaies et ouvert ses yeux sur l’horion après avoir enterré ses tripes dans les terres profondes et arides. Feu Mohamed Sektaoui était militant, un vrai, son héritage demeura dans ses mots qui continuent de porter son message et ses lettres de noblesse. L’article De la parole poétique pour interroger le monde est apparu en premier sur ALBAYANE.