Ce jour, 20 novembre 2024, Dr. Choguel Kokalla Maïga, Premier ministre de la transition, est démis de ses fonctions par le général d’armée, Assimi Goïta, président de la transition malienne.
Le 16 novembre 2024 au Centre international de conférence de Bamako, Choguel Kokalla Maïga, président du comité stratégique du M5-RFP, lance à l’auditoire « […] l’espoir s’amenuise, avec la recrudescence de l’insécurité et le manque de perspective ». C’est dans les rapports de force que les tempéraments s’affirment. Maïga se plaint de ne pas pouvoir gouverner. Donc, il tente d’exorciser ce qui le fait souffrir, son exclusion des décisions importantes du pays. Certes, il laisse apparaître, dans ce discours, les règles du jeu politique : stratégie, débat d’idées, tactique, etc. Mais, il fait voler en éclats les liens qu’il entretenait avec Goïta. Fini les discours enrobés en raison du pacte d’honneur du 24 mai 2021. Pire, Maïga clame que « Rien de consistant ne saurait se faire dans le désordre ». Les critiques de Maïga à l’endroit des autorités de la transition ont atteint le summum. Sans blâmer le président Goïta, sur le style argumentatif et sur un vieil air politico-militaire, Maïga se lâche, une façon de faire qui ne déplaît pas à ses ouailles. Certes Maïga a des atouts : prise de risque, discours à l’Assemblée générale des Nations unies en septembre 2021. Mais il est rattrapé par la patrouille. Les rivalités s’exacerbent.
Les clivages et les divisions
Qui sait si ce discours aura une influence sur les Maliens ? Ce qui est sûr, c’est que dans l’immédiat, cela excite les réseaux sociaux même s’il ne semble ni émouvoir la classe politique ni soulever les foules. Sauf quelques soutiens des autorités de la transition comme l’Alliance pour la refondation du Mali ou le Mouvement pour la résistance citoyenne qui s’insurgent contre les propos de Maïga. Probablement une manière de se faire remarquer. En attendant, Maïga et ses soutiens s’affairent sur le terrain politico-religieux en exprimant par exemple leur gratitude au « vénéré Chérif de Nioro ». Ainsi, Maïga tente d’étouffer dans l’œuf toute velléité revancharde. Isolé, Maïga anticipe sur un hypothétique soutien des milieux religieux dans une éventuelle course à la magistrature suprême. Mais là c’est une autre paire de manches. D’un point de vue systémique, les gouvernements (I et II) de Maïga n’ont pas réussi à transformer le Mali. Les clivages et les divisions ont eu raison du vent d’optimisme. Pris en tenaille entre les réseaux de la communauté internationale et une partie des militaires, Maïga n’a pas pu créer un espace politique à lui. Les différentes tentatives, comme le mémorandum du 24 mai 2024 et le discours du 16 novembre 2024, sont devenus des malentendus au sein de l’exécutif. Les positions se durcissent. Les uns s’égosillent. Les autres grognent. Devenu poil à gratter des autorités, et dans l’impossibilité de buriner sa propre statue, Maïga chute le 20 novembre 2024 après trois ans et demi à la Primature. Fini le rôle de fusible.
Pour le futur Premier ministre, travailler à un recentrage
Concluons sur ce discours de Maïga au cœur des ténèbres au moment où les Maliens paient le prix fort des injustices : énergie, sécurité, politique, justice. Ce n’est pas une sinécure de dire qu’il y a péril en la demeure. Partout résonne « on n’en peut plus ». Pour le futur Premier ministre, la proposition serait de travailler à un recentrage : renouer les liens avec les autres États de la sous-région, libérer les prisonniers politiques, rétablir le dialogue avec les partis politiques, le CSP-PSD et l’Algérie. Dans une guerre, il n’y a que des perdants. Il faudra sans doute sortir d’une perception crépusculaire et rabougrie du Mali pour cheminer vers une vision démocratique du pays. C’est le moment pour transformer l’essai en redonnant confiance aux Maliens et aux investisseurs.
Le limogeage de Choguel impactera-t-il son avenir politique ?
Oui, car cela entraîne son exclusion de la scène politique ;
Non, une partie des Maliens lui font encore confiance ;
Je préfère qu’il se retire de la scène publique.
Et vous, qu’en pensez-vous ?
Mohamed Amara
Sociologue