La mise en place du nouvel attelage gouvernemental dirigé par le Général de division Abdoulaye Maiga, le 1er anniversaire de la libération de Kidal par les Forces armées maliennes (FAMa), les enjeux et opportunités de la Confédération des Etats du Sahel sont, entre autres, sujets sur lesquels s’exprime, dans cette interview, le président du Parti Actions pour le Mali (PAM-Faso Baara)
L’Essor : Quel regard portez-vous sur la situation sociopolitique au Mali ?
Ousmane Dramé : Avant tout, permettez-moi d’avoir une pensée pour les victimes de la barbarie qui nous a été imposée depuis plus d’une décennie, prier pour le repos de l’âme des disparus et souhaiter un prompt rétablissement aux blessés. Je prie Dieu pour qu’il protège les FAMa qui se battent sur le terrain afin de permettre aux Maliens de vaquer à leurs occupations, de s’adonner à leurs activités économiques pour le développement de notre pays.
La situation sociopolitique est aujourd’hui caractérisée par une volonté affichée de la population malienne à aller vers un changement radical de la pratique de la politique. Cela s’est manifesté par le grand soutien de la population aux vives autorités de la Transition par la mobilisation monstre du 14 janvier 2022. Cette volonté populaire impose aux hommes politiques un changement de comportement et d’adapter notre démocratie à nos réalités socioéconomiques et culturelles.
L’Essor : Comment avez-vous accueilli la semaine dernière la formation du gouvernement dirigée par le Général de division Abdoulaye Maïga ?
Ousmane Dramé : Nous voulons d’abord saluer les efforts déployés par le Dr Choguel Kokalla Maïga pendant le temps qu’il a passé à la Primature. Il a posé des actes avec beaucoup de courage pour pouvoir donner un contenu à la Transition sous le leadership du Chef de l’État. Nous saluons et félicitons le Général de division Abdoulaye Maïga pour la confiance placée en lui par le Général d’armée Assimi Goïta. Nous ne doutons aucunement de ses capacités managériales et techniques de pouvoir mener à bien cette mission.
Pour le gouvernement, nous souhaitons une bonne chance aux ministres sortants dans leur nouvelle vie. Nous apprécions l’arrivée des nouveaux, notamment Mamou Daffé à la tête du département en charge de la Culture. Il s’est beaucoup battu pour le rayonnement du Mali à l’étranger. Quand vous prenez le parcours des autres ministres, vous vous apercevez qu’ils n’ont pas été choisis au hasard.
Les priorités de la nouvelle équipe, c’est la continuité suivant les 3 D (Défense, Diplomatie et Développement) qui doivent sous-tendre toute action gouvernementale au Mali. D’importants progrès ont été réalisés sur le plan militaire, mais des efforts supplémentaires sont nécessaires pour renforcer la pacification et la sécurité du pays. Par ailleurs, cette équipe doit s’engager à relancer l’économie nationale, afin de créer davantage d’emplois et offrir un répit à une population résiliente. Il est également essentiel qu’elle concentre ses efforts sur le secteur de l’éducation, véritable pilier du développement d’une nation.
Les priorités incluent également l’énergie et les élections. Dans le projet de budget 2025, une rubrique spécifique est dédiée à l’organisation des élections. Il est essentiel de travailler à la tenue d’élections inclusives, dont les résultats seront reconnus et acceptés par tous. La composition du gouvernement illustre clairement la volonté du Chef de l’État de garantir un processus électoral transparent. Cette volonté se traduit notamment par l’élargissement des attributions du ministre délégué auprès du Premier ministre, désormais chargé de l’appui au processus électoral, une nouveauté par rapport à la configuration gouvernementale précédente. La tenue d’élections bien organisées pourrait contribuer à apaiser les tensions politiques et offrir à l’État les moyens nécessaires pour mettre en œuvre les recommandations issues des assises nationales.
L’Essor : Un mot sur la commémoration de l’an I du 14 novembre 2023, jour de libération de Kidal par l’Armée.
Ousmane Dramé : Aujourd’hui, je considère plus le 14 novembre comme étant la véritable date d’indépendance du Mali. Depuis 1960 jusqu’à un passé récent, le Mali n’avait pas été un pays véritablement indépendant. Un pays indépendant doit prendre ses décisions sans se référer à d’autres et choisir en toute liberté ses partenaires. Il est aussi maître de son territoire. À part la parenthèse de Modibo Keïta qui n’a pas beaucoup duré, nous sommes restés coincés dans un système international qui faisait que toutes les ex-colonies faisaient allégeance à l’ancien colonisateur.
Cela appartient désormais au passé. Le Général d’armée Assimi Goïta et son équipe ont su donner à notre pays toute sa dignité et sa souveraineté. Aujourd’hui, beaucoup d’efforts sont en train d’être faits pour aller vers la souveraineté économique et culturelle. Nous sommes sur la bonne voie. Nous sommes fiers de notre Armée et de nos dirigeants pour des mesures qu’ils ont eu à prendre pour récupérer l’ensemble du territoire. Ils sont sur la voie de la construction d’État digne de ce nom.
Toutefois, cette souveraineté doit être soutenue par une indépendance économique. Et je pense que les autorités sont en train de prendre des mesures privées pour que les entreprises du secteur puissent devenir de véritables moteurs de développement de notre pays. C’est en créant des ressources, des richesses qu’on peut soutenir l’effort de guerre.
L’élévation des six colonels à titre exceptionnel au grade de général est une excellente choisie pour notre pays. Cela aurait dû être fait au lendemain de la libération de Kidal. Le Président Assimi Goïta et ses camarades ont décidé de se sacrifier pour le Mali au détriment de leur propre sécurité. Nous savons comment tous les dirigeants qui se sont levés contre le colonisateur ont fini. Sachant qu’ils vont être combattus par beaucoup, ils ont décidé de s’attaquer à un système qui a été mis en place pour exploiter nos États. Ils sont en phase avec le serment qu’ils ont fait pour le Mali.
L’Essor : L’avenir du Mali, c’est aussi au sein de la Confédération AES présidée depuis quelques mois par le Chef de l’État, le Général d’armée Assimi Goïta.
Ousmane Dramé : Comme on le dit, l’histoire se répète, en effet, le Mali a toujours été à l’avant-garde pour promouvoir les regroupements. Ainsi, notre pays a eu à jouer un rôle majeur dans la création des ensembles régionaux comme, entre autres, l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal (OMVS) créée en mars 1972, la Communauté économique des États de l’Afrique. de l’Ouest (Cedeao) qui a vu le jour en mai 1975.
Aujourd’hui encore, Nigériens et Burkinabè ont fait confiance au Mali et ont décidé ensemble de créer l’Alliance du Liptako-Gourma, une initiative qui jouit de l’adhésion des populations des trois pays. Il s’agit d’un processus qui devrait logiquement conduire les trois pays vers une Fédération. Économiquement, c’est viable. En termes de ressources naturelles le Burkina, le Mali et le Niger ont tout pour être autosuffisants sur le plan alimentaire, de pouvoir consommer ce qu’ils produisent et transforment leurs matières premières.
Justement, par exemple, dans le cadre de la construction de la Confédération, le roaming, qui consiste, pourrait un coût assez élevé, à pouvoir utiliser son téléphone mobile avec la même puce dans un autre pays, sera supprimé entre les trois États à partir de de janvier 2025. Désormais, les ressortissants du Burkina, du Mali et du Niger pourront se servir de leur téléphone dans les trois pays dans les mêmes conditions comme s’ils étaient chez eux. Ce qui facilitera considérablement la communication et les affaires entre nos États.
Par ailleurs, nous recommandons au gouvernement de maintenir le dialogue avec tous nos voisins et la communauté internationale dans le cadre du strict respect des trois principes qui guident l’action publique au Mali.
Propos recueillis par
Masse SIDIBE