IA, formation, partenariat public-privé… Les détails des recommandations d’un groupe d’experts réunis par le think tank de la CDG
Santé : L’institut du Groupe CDG, une plateforme de réflexion, vient de réunir un groupe d’experts marocains pour explorer les défis et les opportunités qui façonneront l’avenir du système de santé au Maroc. Les détails des recommandations.
La «Santé 2030» est à la fois un concept collectif et une vision stratégique pour repenser les systèmes de santé dans le monde à l’horizon 2030. C’est ainsi que l’Institut de la CDG (Caisse de dépôt et de gestion) présente le travail effectué pour explorer l’avenir du système de santé au Maroc. «Face à l’évolution rapide des technologies, des attentes des patients et des défis sanitaires, il est crucial de réimaginer les systèmes de soins pour le futur», explique-t-on à la CDG. La même source précise qu’avec une population marocaine en forte croissance et à des besoins de santé en constante évolution, il est essentiel de repenser le système de santé du Maroc pour qu’il soit plus performant, accessible et innovant. Dans ce sens, un webinaire a réuni des experts en la matière afin d’explorer les défis et les opportunités qui façonneront l’avenir du système de santé au Maroc.
Avec près de 20.000 médecins marocains exerçant à l’étranger, des efforts doivent être faits pour leur offrir un environnement de travail attractif.
Les discussions ont porté essentiellement sur les dernières tendances technologiques et scientifiques qui façonnent le futur de la santé (notamment l’intelligence artificielle), les initiatives pour améliorer l’accès aux soins de qualité pour tous les Marocains, indépendamment de leur situation géographique ou socio-économique (santé dans les territoires) ainsi que les stratégies pour renforcer et moderniser les infrastructures, la formation et la gestion des ressources humaines dans le secteur de la santé sans oublier les partenariats entre les secteurs public, privé et les organisations non-gouvernementales pour une approche holistique et intégrée de la santé. Le choix de l’horizon 2030 s’inscrit dans l’Agenda 2030 pour le développement durable adopté en 2015 par les Nations Unies, s’appuyant sur des objectifs précis pour répondre à des enjeux importants : 50% de la population mondiale n’a pas accès aux soins essentiels et deux milliards de personnes dans le monde subissent des difficultés financières en raison des dépenses de santé. Parmi les objectifs attendus : l’amélioration de l’espérance de vie et de la qualité de vie pour tous, le renforcement des systèmes de santé et de leur résilience, des progrès significatifs dans l’éradication de certaines maladies ainsi qu’une réduction globale des décès évitables…
Financement
La question du financement figure en tête des recommandations de l’Institut. «Le financement du secteur de la santé constitue un enjeu majeur. Une révision de la tarification nationale de référence est nécessaire pour permettre une rémunération compétitive des professionnels de santé et garantir leur fidélisation. Cela inclut également l’amélioration des conditions de travail et des infrastructures, afin d’attirer de nouveaux talents et de répondre efficacement aux besoins du secteur», précise-t-on. Et de poursuive: «Attirer les compétences médicales marocaines de l’étranger représente une opportunité significative. Avec près de 20.000 médecins marocains exerçant à l’étranger, des efforts doivent être faits pour leur offrir un environnement de travail attractif, des équipements modernes et des niveaux de rémunération adaptés. Ces mesures pourraient répondre en partie à la pénurie actuelle et renforcer le système de santé». Les recommandations portent également sur la formation des professionnels de santé présentée comme étant cruciale. «Il est nécessaire de revoir les politiques de rémunération et de création d’incitations pour encourager les médecins et autres professionnels à travailler dans les régions sous-dotées. Un système de contractualisation pour les médecins formés dans le secteur public serait un
levier important pour limiter l’émigration des talents médicaux», recommandent les experts. «La construction d’une souveraineté sanitaire nationale permettra de répondre aux besoins de la population, notamment en période de crise.
Une solution clé réside dans l’intégration de technologies avancées qui permettraient d’optimiser les capacités des professionnels de santé existants.
L’expérience vécue pendant la pandémie Covid-19 a mis en évidence les faiblesses du système, soulignant la nécessité d’anticiper les besoins en équipements médicaux et infrastructures d’urgence. Un système de santé plus autonome renforcerait également les relations avec l’Afrique, contribuant à un modèle de santé régional plus résilient», ajoute la même source expliquant que «pour garantir l’accès à des traitements de qualité à un coût abordable, le Maroc doit renforcer sa capacité à produire des médicaments localement et soutenir la recherche. Il est ainsi recommandé d’encourager le développement des essais cliniques et l’encouragement à l’innovation thérapeutique qui sont essentiels pour réduire la dépendance vis-à-vis des importations et favoriser des prix plus compétitifs. «Le secteur de la santé au Maroc nécessite un développement des métiers et des infrastructures pour devenir plus innovant, avec un accent particulier sur la digitalisation et l’intelligence artificielle. La fuite des cerveaux dans le domaine médical, en particulier la perte d’un grand nombre de médecins formés, constitue un défi majeur. Une solution clé réside dans l’intégration de technologies avancées, qui permettraient d’optimiser les capacités des professionnels de santé existants», propose l’Institut de la CDG. Et de conclure : «Le renforcement des partenariats entre les universités et les hôpitaux est primordial pour stimuler l’innovation, la recherche et la création de startups. En parallèle, le développement d’une industrie biomédicale locale pourrait offrir des solutions plus accessibles et compétitives sur le marché africain». A noter enfin que la refonte du système de santé marocain est en cours au Maroc. Elle s’appuie sur un nouveau cadre réglementaire. Elaborée conformément aux Hautes orientations royales, la nouvelle loi 06-22 révise et restructure le système de santé national avec de nouveaux défis à relever et des objectifs à atteindre tout en s’appuyant sur quatre piliers principaux.
C’est le titre de la boite
Défis
Démographie et santé
Le système marocain fait face à plusieurs défis complexes mais aussi à des opportunités de transformations importantes. «La croissance démographique rapide, associée à un vieillissement de la population, génère de nouveaux besoins en matière de soins. L’augmentation de la population, tel que révélé par le dernier recensement, combinée à l’augmentation des maladies chroniques, met une pression croissante sur les services de santé. Les maladies chroniques, souvent coûteuses, sont devenues un véritable défi pour le système de santé, avec un impact direct sur les coûts et la gestion des soins», explique-t-on.
Et d’ajouter : «L’inégalité d’accès aux soins demeure un problème majeur, particulièrement entre les zones urbaines et rurales, avec une concentration des hôpitaux dans les grandes villes. Pour répondre à cette problématique, l’intelligence artificielle offre des opportunités prometteuses pour faire face à ces disparités. Le parcours de soins reste aussi mal coordonné, ce qui nuit à l’efficacité du système». Par ailleurs, le Maroc a démontré une grande capacité à construire rapidement des infrastructures hospitalières modernes, les capacités de prise en charge demeurent insuffisantes face à l’augmentation des besoins.
Cependant, le secteur privé, qu’il soit lucratif ou à but non lucratif, joue un rôle crucial dans l’expansion des services de santé, avec des investissements dans des infrastructures modernes et de qualité. «L’un des principaux défis réside dans la disponibilité de personnels qualifiés pour exploiter ces infrastructures. Une réflexion approfondie est nécessaire pour développer un système éducatif adapté, capable de former des médecins et des professionnels spécialisés dans les technologies avancées», précise la même source.
Infrastructures technologiques
Dépendance
Sur le plan technologique, le Maroc continue de dépendre fortement de produits et de matériels médicaux et d’équipements technologiques importés. Ce qui limite l’indépendance sanitaire du pays et constitue un frein au développement de son autonomie et sa capacité à innover en matière de santé.
IA locale
Il devient urgent de développer une infrastructure locale pour l’IA, notamment pour l’hébergement des données, la gestion des clouds et le soutien technique. Cela implique également de former une main-d’œuvre qualifiée dans des métiers spécialisés.
Startups
L’écosystème marocain n’est pas encore adapté à la création de start-ups, pourtant essentielles pour accélérer l’innovation en santé. Un cadre légal plus flexible et favorable est nécessaire pour stimuler l’entrepreneuriat dans le domaine de la santé.